Les nationalistes thaïlandais, affairés à soutenir l’armée déployée le long de la frontière, viennent de perdre une bataille sur le tapis vert de la justice.
Impossible, en effet, de ne pas considérer la révocation judiciaire de la Première ministre thaïlandaise comme une victoire de Hun Sen, l’ex-grand ami de son père, Thaksin Shinawatra. C’est Hun Sen, cet incroyable survivant de la politique cambodgienne, qui a provoqué cette crise politique en diffusant le contenu de sa conversation avec l’inexpérimentée Paetongtarn Shinawatra. C’est encore Hun Sen qui, derrière son fils Hun Manet, a tiré les ficelles des opérations militaires cambodgiennes ces dernières semaines. Et c’est Hun Sen, rappelons-le, qui avait accordé l’asile politique à Thaksin, victime d’un coup d’État militaire le 19 septembre 2006.
Hun Sen grand vainqueur, et maintenant ?
Sur le papier, l’hypothèse d’une nomination du leader du Bumjaithai, Anutin, est sans doute celle qui parachèverait le succès du « parrain » cambodgien. Anutin est la créature de Newin Chidchob, le patron du clan de Buriram, cette influente province frontalière. Nul doute qu’entre les deux hommes rompus à tous les trafics, les lignes de communication existent.
Le paradoxe est que l’ancien Premier ministre cambodgien, aujourd’hui âgé de 73 ans, a peut-être provoqué une crise qui va porter au pouvoir, comme partenaire d’une future coalition, le Parti du peuple (People’s Party), actuellement dans l’opposition. Un parti tenu dans la plus grande méfiance par les militaires thaïlandais.
Vous suivez ? In fine, la manipulation de Hun Sen pourrait justifier, au nom de la stabilité frontalière, un retour au pouvoir de l’armée thaïlandaise ou de ses partis affiliés pour éviter que la crise s’installe au sommet du pays. L’ancien officier khmer rouge, hier protégé du Vietnam communiste, se retrouverait aujourd’hui allié des forces les plus conservatrices du royaume de Thaïlande. Quel parcours ! Et quelle habileté, comparée aux échecs successifs, en Thaïlande, de la dynastie Shinawatra !
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