Anutin Charnvirakul élu Premier ministre de Thaïlande après une période de troubles politiques. L’ancien ministre de la Santé s’est fait le champion de la légalisation du cannabis. La politique pragmatique d’Anutin concilie les intérêts conservateurs et populistes en Thaïlande.

Anutin Charnvirakul n’a attendu que quelques heures après la fuite, en juin, d’un appel téléphonique qui allait entraîner la chute du Premier ministre thaïlandais pour passer à la vitesse supérieure dans ses manœuvres visant à prendre le pouvoir. Le politicien chevronné a rapidement quitté la coalition au pouvoir dirigée par Paetongtarn Shinawatra, du parti Pheu Thai, a pris contact avec la principale opposition et s’est mis en retrait pour attendre le moment opportun.

Vendredi, une semaine après la décision de justice destituant Paetongtarn de son poste de Premier ministre et déclenchant une tempête politique, le Parlement a voté à une écrasante majorité pour élire Anutin prochain Premier ministre de Thaïlande.

L’ascension de cet homme de 58 ans s’est préparée pendant des décennies, depuis ses débuts en politique au sein du parti Thai Rak Thai fondé par le père milliardaire de Paetongtarn, Thaksin Shinawatra. Ces dernières années, l’influence croissante d’Anutin dans la deuxième économie d’Asie du Sud-Est s’est principalement exercée par l’intermédiaire du parti Bhumjaithai, un nouveau venu dans la politique thaïlandaise qui trouve ses racines dans les communautés agricoles de la région nord-est du pays.

Au cours de deux cycles électoraux, en 2019 et 2023, les experts ont évoqué le nom d’Anutin parmi ceux pressentis pour occuper le poste de Premier ministre, le voyant très probablement diriger un gouvernement de coalition compte tenu de son influence au-delà des clivages politiques. Cela ne s’est pas produit.

Au lieu de cela, Anutin s’est fait connaître en tant que ministre de la Santé pour sa gestion de la pandémie de COVID-19 et pour avoir défendu la légalisation du cannabis en Thaïlande en 2022. « Je suis plus jeune, plus dynamique et je comprends la politique dans un système démocratique », a-t-il déclaré à Reuters en 2023, ne cachant pas son ambition d’accéder au poste suprême et ses attentes d’une large victoire.

Le Bhumjaithai n’a réussi à obtenir que 70 des 500 sièges à pourvoir, mais après avoir contribué à empêcher le Move Forward, vainqueur des élections, de prendre le pouvoir, le parti s’est associé au Pheu Thai en tant que partenaire junior pour former un gouvernement qui a détenu le pouvoir pendant deux ans.

Anutin et son parti constituent un pont rare entre les puissants clans familiaux qui dominent la politique provinciale et certaines sections de l’establishment royaliste-conservateur influent, a déclaré Napon Jatusripitak, chercheur invité à l’ISEAS-Yusof Ishak Institute de Singapour. « C’est un politicien très pragmatique, issu du même moule que Thaksin Shinawatra », a déclaré Napon à propos d’Anutin, un royaliste déclaré qui s’engage à préserver la position vénérée de la monarchie thaïlandaise. « Aujourd’hui, il a positionné son propre parti de manière à en faire le gardien le plus crédible des intérêts conservateurs en Thaïlande. »

Une lutte incessante entre l’establishment conservateur et les partis populistes soutenus par Thaksin a marqué la politique thaïlandaise, déclenchant des coups d’État militaires et des verdicts judiciaires qui ont renversé six Premiers ministres élus au cours du dernier quart de siècle.

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