Gavroche a sélectionné pour vous quelques nouvelles saillantes en Birmanie durant cette semaine écoulée. Un survol de l’actualité indispensable pour tous ceux qui s’intéressent à ce pays d’Asie du Sud-Est.
Politique, Diplomatie
Le régime birman a annoncé son intention d’inviter des observateurs internationaux pour surveiller les élections prévues entre la fin de l’année et le début de l’année prochaine. Selon le ministère des Affaires étrangères, des invitations seront adressées directement aux ambassades, consulats et missions permanentes. Les observateurs devraient provenir principalement de Chine, de Russie, de Biélorussie et du Cambodge. Des volontaires locaux pourront également participer, mais toute déclaration affirmant que le scrutin n’est ni libre ni équitable sera passible de sept ans de prison, en vertu de la nouvelle loi sur la « protection des élections ».
Le régime birman multiplie les démarches diplomatiques à l’approche des élections prévues entre la fin de l’année et le début de 2026. Soutenu par la Chine, il a envoyé ministres et hauts fonctionnaires à plusieurs réunions régionales, dont l’exposition Chine-ASEAN de Nanning, conduite par le Premier ministre Nyo Saw. Des discussions sur la coopération militaire et la sécurité frontalière ont également eu lieu à Pékin, tandis que Min Aung Hlaing a adressé un message d’anniversaire à Narendra Modi dans le cadre du rapprochement avec l’Inde. Parallèlement, des délégations birmanes ont participé à des forums de l’ASEAN en Indonésie et en Malaisie. Ces initiatives visent à renforcer la légitimité internationale du régime.
La Commission électorale birmane a annoncé que le vote ne se tiendra pas dans 121 circonscriptions lors de la première phase des élections, prévue le 28 décembre. Ces zones, situées dans 56 cantons contrôlés par des forces de résistance ou des groupes ethniques armés, concernent notamment les États de Kachin, Karenni, Chin, Rakhine et Shan, ainsi que les régions de Sagaing, Magwe et Mandalay. 172 autres cantons, situés en zones de conflit actif, restent dans l’incertitude quant à la tenue du scrutin, laissant entendre que le régime pourrait intensifier ses opérations militaires pour reprendre le contrôle de ces régions avant les prochaines phases des élections.
En septembre, l’ASEAN avait prévu d’envoyer une délégation ministérielle en Birmanie pour discuter du plan électoral du régime. La visite, dirigée par le ministre malaisien des Affaires étrangères et comprenant les ministres d’Indonésie, de Thaïlande et des Philippines, visait à examiner la tenue d’élections crédibles. Elle a été annulée après que Min Aung Hlaing a refusé de recevoir les ministres, jugeant la rencontre inutile, d’autant qu’il bénéficie du soutien de la Chine et de l’Inde pour son plan d’élections, désormais annoncé en plusieurs phases par le régime militaire.
Le 12 septembre, le régime birman a bombardé deux écoles privées dans l’État de Rakhine, faisant 20 morts parmi les élèves et 22 blessés. L’Armée d’Arakan (AA), bras armé de la Ligue unie d’Arakan (ULA), a dénoncé un « crime de guerre » et appelé la communauté internationale à des mesures « efficaces et décisives ». L’ULA a promis de soumettre les preuves aux organisations internationales et de « prendre des représailles fortes » contre les responsables. À l’étranger, l’UNICEF s’est dite « extrêmement préoccupée » et a rappelé l’obligation de protéger les civils et de respecter le droit international, sans désigner explicitement l’auteur de l’attaque.
Économie
Le Premier ministre birman, Nyo Saw, a choisi la Chine pour sa première visite officielle à l’étranger, en se rendant à Nanning à l’occasion de la 22ᵉ exposition Chine-ASEAN. Objectif affiché : renforcer les échanges commerciaux et les investissements avec Pékin, dans la continuité des accords conclus lors de la visite de Min Aung Hlaing le mois dernier. Ancien lieutenant-général, Nyo Saw a rencontré le vice-président chinois Han Zheng et d’autres dirigeants, qui ont réaffirmé leur soutien au régime pour « maintenir la stabilité nationale, la souveraineté et l’indépendance ». Le chef du gouvernement a rassuré Pékin quant à la sécurité de ses projets en Birmanie, invité les investisseurs chinois à s’engager dans des secteurs comme les véhicules électriques et réitéré son engagement à approfondir la coopération dans le cadre de l’initiative des Nouvelles Routes de la soie.
Pour contourner les sanctions internationales, le régime birman cherche à écouler ses rubis et saphirs sur le marché chinois. Le ministère du Commerce a organisé à Nanning un événement promotionnel où le ministre a vanté la qualité des gemmes birmanes. Un protocole d’accord a été signé avec des associations d’entrepreneurs et des centres de commerce chinois afin de faciliter leur distribution dans plusieurs provinces. Cette initiative intervient alors que Naypyidaw a perdu le contrôle de la ville minière de Mogok, désormais tenue par l’Armée de libération nationale Ta’ang (TNLA). Des allégations font état de concessions minières accordées à des entités liées à la TNLA et à des intérêts chinois.
Répression, conflit
Le régime birman a arrêté deux hommes, Aung Ye Htut et Yan Naing Kyi Win, dans le canton de Hlaing Tharyar à Rangoun, pour avoir collé des affiches hostiles aux élections. Dénoncés puis interpellés, ils ont reconnu avoir placé des autocollants dans plusieurs lieux publics. Poursuivis en vertu de la nouvelle loi sur la « protection des élections », ils risquent des peines allant de la prison à perpétuité à la peine de mort. Ces arrestations interviennent après la condamnation à sept ans de prison du blogueur Ko Nay Thway, coupable d’avoir raillé la capacité du régime à organiser le scrutin. Le vice-ministre de l’Intérieur a en outre ordonné des mesures contre les internautes opposés aux élections.
L’armée birmane a mené une frappe aérienne contre une position du 12e bataillon de l’Armée pour l’indépendance de la Kachin (KIA) dans l’État de Kachin, faisant environ 17 morts et une douzaine de blessés, selon des sources locales. Le site visé serait un camp d’entraînement, mais le porte-parole de la KIA, le colonel Naw Bu, n’a pas confirmé le bilan. Des images des victimes et des destructions ont circulé sur les réseaux sociaux. Cette attaque intervient dans un contexte d’intensification des combats, notamment à Shwegu, placé sous loi martiale depuis le 1er août. Depuis la mi-août, le nombre de frappes aériennes de la junte aurait doublé, causant plus de 100 morts dans tout le pays, tandis que la KIA affirme avoir pris plusieurs positions et villes.
Des responsables bangladais accusent l’Armée d’Arakan (AA) de se livrer au trafic de yaba et de méthamphétamine à travers la frontière en échange de nourriture et de biens de première nécessité. Selon le Daily Sun de Dhaka, l’AA écoulerait ces stupéfiants via des réseaux de contrebande opérant avec des syndicats locaux. La Garde côtière et la Garde-frontière du Bangladesh (BGB) affirment que la contrebande s’est accrue depuis que l’AA contrôle la frontière, une grande partie des saisies provenant de l’État Shan birman. L’Armée d’Arakan rejette catégoriquement ces accusations, les qualifiant de « dénuées de fondement et politiquement motivées ». Son porte-parole, Khaing Thukha, assure que la BGB contrôle trop étroitement la frontière pour permettre de tels trafics, accusant au contraire la BGB d’en tirer profit. Selon lui, le trafic aurait cessé depuis la prise de contrôle de la zone par l’AA et ces accusations viseraient à compenser la perte de revenus illicites des gardes-frontières bangladais. L’AA accuse en outre la BGB d’armer et d’entraîner des groupes militants bengalis pour commettre des crimes transfrontaliers.
Le régime militaire birman a lancé une vaste opération pour reprendre l’autoroute de l’Union No 8, reliant l’État de Mon à la région de Tanintharyi. Plus de 1 000 soldats, appuyés par des renforts navals et des frappes aériennes, affrontent quasi quotidiennement les forces de la résistance locale. Après un mois de combats, ces dernières assurent toujours contrôler la majeure partie de l’axe stratégique. Les affrontements sont particulièrement intenses dans le district de Dawei depuis la mi-août.
De violents affrontements opposent l’armée birmane et ses alliés de l’Armée nationale Shanni (SNA) aux forces de la résistance dans la ville de Banmauk, région de Sagaing. L’offensive a débuté après le blocus des routes d’accès par la résistance, qui regroupe notamment des unités de la Force de Défense du Peuple (PDF). Des bases défensives auraient été prises, tandis que l’armée riposte avec l’artillerie et des frappes aériennes. Le régime ayant imposé un blocus des communications, l’ampleur des pertes civiles reste inconnue. Les combattants de la résistance visent à ajouter Banmauk à leur zone de contrôle, après la prise des villes voisines d’Indaw et de Pinlebu.
Des habitants de Hpakant, dans l’État Kachin, ont affirmé au média DVB que l’Armée de l’indépendance kachin (KIA) a procédé depuis le 9 septembre au recrutement forcé d’une centaine de jeunes hommes. Située à l’ouest et au nord-ouest de Myitkyina, capitale de l’État, Hpakant est également un bastion stratégique où les combats entre le KIA et l’armée birmane ont repris en juin. Un résident a indiqué que la population n’osait plus sortir et que le KIA n’avait pas informé les habitants de cette campagne de recrutement. Le porte-parole du KIA, Naw Bu, n’a pas répondu aux sollicitations de DVB. Il a toutefois déclaré au Kachin News Group que le KIA s’était retiré le 11 septembre de deux bases de l’armée birmane à Bhamo, qu’il contrôlait depuis février, en raison de renforts gouvernementaux appuyés par l’artillerie et des drones fournis par la marine birmane.
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