Gavroche a sélectionné pour vous quelques nouvelles saillantes en Birmanie durant cette semaine écoulée. Un survol de l’actualité indispensable pour tous ceux qui s’intéressent à ce pays d’Asie du Sud-Est.
Politique, Diplomatie
Le régime militaire birman a assoupli les conditions de participation pour les partis politiques en vue des prochaines élections de décembre et janvier. Cette décision a été prise peu après la dissolution de quatre partis qui n’avaient pas respecté les critères d’enregistrement. Les nouvelles règles réduisent de moitié les circonscriptions que les partis nationaux doivent présenter : au lieu de 417, un parti n’est plus obligé d’en présenter que 209 sur un total de 833. Initialement, 61 partis s’étaient enregistrés pour les élections, dont 9 pour une participation nationale. Cependant, le 9 septembre, le régime a dissous quatre d’entre eux, le National Democratic Force (NDF), le Democratic Party of National Politics (DNP), le Women Party (Mon) et le Union Farmer-Labor Force Party, car ils ne remplissaient pas les critères d’adhésion et de bureaux minimum requis.
Min Aung Hlaing a nommé son aide personnel, le major général Moe Myint Swe, à la tête de la Direction des industries de la défense (DDI). Cette promotion surprend, car l’officier est issu de l’école de formation des officiers (OTS) et non de la prestigieuse Académie des services de défense, habituellement réservée aux hauts dirigeants.
Dans le même mouvement, le major général Kyaw Ko Htike prend la tête de la formation militaire, tandis que le major général Myo Min Tun devient chef de l’inspection militaire et auditeur général. Le Bureau des opérations spéciales a également été réorganisé. Enfin, le brigadier général Tin Min Latt a été nommé au commandement central et le brigadier général Kyaw Naing Oo au commandement central oriental.
Le Parti de la solidarité et du développement de l’Union (USDP), allié de la junte birmane, s’impose largement dans les élections prévues en décembre et janvier. Selon la Commission électorale, plus de 1 000 de ses candidats figurent parmi les 4 900 en lice, soit près du double de ceux du Parti de l’unité nationale (NUP, 694). L’USDP, composé d’anciens généraux et militaires à la retraite, aligne à lui seul plus de candidats que les 51 autres partis régionaux réunis, qui totalisent 960 candidatures.
Le régime militaire birman a sollicité la Russie afin de superviser les élections prévues entre décembre et janvier. L’ambassadeur de Russie, Iskander Azizov, a rencontré le président de la Commission électorale pour en discuter. Parallèlement, le chef de la junte, Min Aung Hlaing, séjourne à Moscou à l’invitation de Vladimir Poutine, illustrant le resserrement des liens entre Naypyidaw et Moscou.
Économie
Min Aung Hlaing, effectue sa quatrième visite en Russie en sept mois pour assister au World Atomic Week, présenté par les médias russes comme l’un des plus grands forums mondiaux consacrés à l’énergie nucléaire. L’événement réunit chefs d’État, experts et dirigeants d’entreprises du secteur. La délégation birmane comprend notamment Myo Aung, ministre en chef de la région de Mandalay. Cette visite s’inscrit dans le prolongement du protocole d’accord signé en mars avec la Russie sur la coopération nucléaire civile. La Birmanie collabore déjà avec l’agence Rosatom, qui doit accompagner la construction d’un petit réacteur modulaire dans le pays.
Le régime militaire birman a restreint l’usage des passeports pour l’emploi (PJ) délivrés aux migrants birmans en Thaïlande. Depuis le 25 septembre, le ministère de l’Intérieur appose un cachet « Passport for Thailand Only », limitant leur validité au seul territoire thaïlandais. Jusqu’ici, les PJ — plus coûteux que les certificats d’identité (CI) qu’ils remplacent — permettaient de voyager vers d’autres pays. Désormais, ils ne se distinguent plus des CI. La mesure, imposée sans préavis ni explication, a pris de court les agences de visas et les migrants. Un responsable des passeports a confirmé que tous les nouveaux PJ convertis à partir de CI recevront ce cachet, et que les détenteurs actuels y seront également soumis lors du renouvellement.
Répression/Conflit
Selon le gouvernement d’union nationale (NUG), les Forces de défense du peuple (PDF) ont annoncé le contrôle de la ville de Banmauk, dans le nord de la région de Sagaing, après une offensive de cinq jours contre l’armée birmane et l’Armée nationale shanni (SNA). La ville, située près de la frontière de l’État Kachin, présente un intérêt stratégique en raison de sa position au cœur de zones disputées. Les PDF affirment avoir saisi 18 bases et des stocks d’armes, tandis que l’armée aurait répliqué par plusieurs frappes aériennes. Banmauk se trouve à proximité de villes encore tenues par la junte, dont Homalin, Wuntho et Paungbyin. Des habitants ont quitté la ville par crainte de contre-offensives.
L’Armée de l’Arakan (AA) a rejeté les affirmations de l’Armée du salut des Rohingyas de l’Arakan (ARSA), qui annonçait avoir pris l’une de ses principales bases dans le canton de Maungdaw, État de Rakhine. Selon l’AA, l’ARSA a diffusé de fausses vidéos tournées sur un site abandonné. L’AA assure que les assaillants ont attaqué un poste frontalier mais se sont repliés au Bangladesh après une contre-attaque. Elle accuse également l’ARSA et l’Organisation de la solidarité des Rohingyas (RSO) d’enlèvements et de violences contre des civils, appelant la population à la vigilance.
Plusieurs organisations de journalistes, dont le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) et l’Independent Myanmar Journalists Association (IMJA), demandent la libération immédiate de Ma Mudra, 30 ans, reporter pour la Border News Agency (BNA). Elle a été arrêtée le 20 septembre à son domicile par l’Armée de l’Arakan (AA), après avoir couvert le manque de services éducatifs dans un village de l’ethnie Mro, déplacée par les combats. L’AA affirme qu’elle est interrogée pour des raisons de sécurité, mais son rédacteur en chef assure qu’elle reste détenue. Les organisations réclament sa libération et la liberté de couvrir le conflit, dans un contexte de forte répression contre la presse en Birmanie depuis le coup d’État militaire de 2021.
Plus de 10 000 villageois karen ont fui leurs foyers ce mois-ci, alors que les troupes du régime birman ont repris des positions à Myawaddy et dans le sud de l’État de Karen. Les civils se sont réfugiés le long de la rivière Moi, à la frontière thaïlandaise, ou dans le district de Hpa-an, toujours contrôlé par l’Union nationale karen (KNU). Les déplacés manquent de nourriture, d’eau, de médicaments et d’abris, les fortes pluies récentes aggravant la situation. L’aide provient surtout de initiatives locales, la sécurité restant un défi majeur. Les affrontements devraient se poursuivre, rendant tout retour au foyer peu probable, alors même que la junte prévoit des élections à Myawaddy le 28 décembre.
Société
Neuf pandas roux, une espèce menacée, ont été saisis le 14 septembre dans le canton d’Indaw, dans la région de Sagaing. L’opération a été menée par une unité des Forces de défense du peuple (PDF). Les animaux ont ensuite été confiés par le ministère des Ressources naturelles et de la Conservation de l’environnement du gouvernement d’union nationale (NUG) à l’Organisation pour l’indépendance kachin (KIO), chargée de les relâcher dans la nature. Le ministère a appelé à renforcer la coopération pour protéger la biodiversité. Moins de 10 000 pandas roux subsisteraient à l’état sauvage, selon les organisations de conservation, qui alertent sur l’essor du trafic d’espèces en Birmanie depuis 2021.
Environ 16 hectares de terres agricoles ont été submergés depuis fin juillet le long de la rivière Lwe, dans l’État Shan. Selon un rapport de la Shan Human Rights Foundation (SHRF), ces inondations boueuses seraient liées à l’expansion des mines de terres rares en amont, situées dans une zone contrôlée par l’Armée unie de l’État Wa (UWSA). Les crues ont recouvert les champs de riz, maïs, arachides et soja d’une épaisse couche de boue, réduisant à néant plusieurs tentatives de replantation. La SHRF indique que le nombre de mines est passé de trois en 2015 à 26 en 2025. Exploitées par des ressortissants chinois ou des coentreprises sino-birmanes, elles utilisent la méthode de lixiviation in situ, accusée d’entraîner une forte pollution des sols et des cours d’eau.
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