Gavroche a sélectionné pour vous quelques nouvelles saillantes en Birmanie durant cette semaine écoulée. Un survol de l’actualité indispensable pour tous ceux qui s’intéressent à ce pays d’Asie du Sud-Est.
Politique, Diplomatie
Le régime militaire birman a tenu à Naypyidaw sa deuxième réunion annuelle consacrée à la conscription, au sein du ministère de la Défense. Le général Maung Maung Aye, ministre de la Défense, y a insisté sur l’importance du service militaire obligatoire et a appelé à intensifier les efforts pour atteindre les quotas de recrutement. Cette mobilisation accrue intervient alors que la junte tente de reprendre le contrôle de vastes zones du territoire avant les élections prévues en décembre. Mais la campagne de conscription suscite des résistances : lors d’un « forum de la paix » organisé la semaine dernière par le régime, plusieurs partis politiques enregistrés pour le scrutin ont exprimé leur opposition, réclamant l’arrêt immédiat du programme.
La Birmanie a officiellement informé la Malaisie, présidente actuelle de l’ASEAN, qu’elle ne soutiendra pas l’adhésion du Timor-Oriental à l’organisation régionale lors du prochain sommet prévu en octobre. Dans une lettre transmise à Kuala Lumpur, la Birmanie affirme que le Timor-Oriental a enfreint l’un des principes fondamentaux de la Charte de l’ASEAN : la non-ingérence dans les affaires intérieures des États membres. Le Conseil d’administration de l’État (SAC) reproche à Dili d’entretenir des liens avec des entités opposées à certains régimes membres de l’ASEAN — notamment le Gouvernement d’unité nationale (NUG), formé en exil, ainsi que les groupes armés de résistance qui s’opposent au pouvoir militaire birman. Naypyidaw exhorte le Timor-Oriental à « s’abstenir » de toute interaction avec ces acteurs, sous peine de voir son processus d’adhésion définitivement bloqué. Dans sa communication officielle, la Birmanie prévient que toute violation persistante du principe de non-ingérence entraînerait un refus ferme d’accepter le Timor-Oriental comme membre à part entière de l’ASEAN.
Le Conseil d’administration de l’État (SAC) prépare actuellement une loi spéciale destinée à protéger les élections prévues en décembre contre d’éventuelles perturbations, ont indiqué les partis politiques enregistrés pour le scrutin. Lors d’une réunion organisée l’an dernier, ces partis ont appelé Min Aung Hlaing, à prendre des mesures concrètes pour assurer la sécurité des candidats, soulignant les difficultés liées au contexte de troubles politiques et aux conflits armés qui perdurent depuis le coup d’État. Un vice-président de parti a souligné que cette loi s’avère indispensable pour garantir la tenue des élections, tout en reconnaissant que l’organisation du scrutin en Birmanie représente un « défi majeur », notamment en raison de l’incapacité du Conseil d’administration de l’État à assurer une protection individuelle efficace. Alors que l’état d’urgence, en vigueur depuis le coup d’État de 2021 et prolongé à plusieurs reprises, doit prendre fin le 31 juillet, le régime militaire devra, selon la Constitution de 2008, transférer le pouvoir au Conseil national de défense et de sécurité, également dirigé par Min Aung Hlaing. Un recensement pré-électoral n’a pu compter que 19 millions d’habitants sur une population totale de 51 millions.
Le lieutenant-général Min Naing, secrétaire du Comité national de solidarité et de négociation pour la paix (NSPNC) de la junte militaire birmane, a pris part à l’Oslo Forum 2025, un rendez-vous international de haut niveau consacré à la médiation dans les conflits. Organisé chaque année par le ministère norvégien des Affaires étrangères en partenariat avec le Centre pour le dialogue humanitaire (HD), ce forum confidentiel réunit des diplomates, des responsables militaires, des négociateurs de paix et des acteurs non étatiques pour échanger sur les moyens de résoudre les conflits armés à travers le monde.
À l’approche de la Réunion des ministres des Affaires étrangères de l’ASEAN (AMM), prévue à Kuala Lumpur les 8 et 9 juillet, des parlementaires d’Asie du Sud-Est appellent les dirigeants régionaux à faire de la libération des prisonniers politiques birmans une priorité. Le réseau des Parlementaires de l’ASEAN pour les Droits de l’Homme (APHR) dénonce le silence de l’organisation face à la répression de la junte. Ce silence, selon l’APHR, « aggrave les souffrances de milliers de personnes injustement emprisonnées » depuis le coup d’État de 2021. L’APHR qualifie ces détentions de « tache sur la conscience régionale » et insiste pour qu’elles soient au cœur de tout futur dialogue avec la Birmanie. Depuis 2021, au moins 29 338 opposants ont été arrêtés, dont plus de 5 000 femmes et au moins 610 enfants. Des cas de torture, de privation de soins et de mauvais traitements ont été signalés. Au moins 130 prisonniers politiques sont morts en détention, dont 50 lors du séisme qui a frappé la prison d’Obo en mars dernier.
La Thaïlande et la Birmanie ont convenu de renforcer leur coopération sur plusieurs questions transfrontalières lors de la 37e réunion du Comité régional des frontières (RBC), qui s’est tenue à Chiang Mai du 2 au 4 juillet. Les discussions ont porté sur l’amélioration de la sécurité aux frontières et le développement bilatéral. Le lieutenant-général Kittiphong Jaemsuwan, chef de la troisième région militaire thaïlandaise, a souligné que le RBC est la plateforme principale pour résoudre les défis frontaliers à long terme. La partie thaïlandaise a notamment soulevé deux problèmes majeurs : la contamination des fleuves Kok et Sai par les métaux lourds, due principalement à l’exploitation minière aurifère non réglementée près de la frontière, et la nécessité de lutter contre les opérations d’escroquerie transnationales.
Économie
Le 30 juin 2025, la Banque centrale de Birmanie a révoqué les certificats d’exportation et d’importation de 197 entreprises, ainsi que ceux de 722 cadres dirigeants, pour non-respect des règles de gestion des devises. Ces derniers risquent jusqu’à un an de prison et une interdiction d’enregistrement. La CBM rappelle que les exportateurs doivent rapatrier 75 % de leurs recettes en devises dans un délai de 30 à 60 jours, selon la destination, et convertir 25 % au taux officiel, sauf dérogation pour les entreprises à capitaux étrangers majoritaires.
La junte birmane a interdit Chit Linn Myaing Toyota Co., une société appartenant à Saw Chit Thu, chef de la milice BGF de l’État Karen, pour avoir enfreint la loi sur la gestion des devises. L’entreprise n’aurait pas rapatrié ses revenus d’exportation en devises dans les délais requis. Saw Chit Thu est aussi soupçonné de diriger un vaste réseau criminel transfrontalier opérant près de la frontière thaïlandaise.
De janvier à mai 2025, la Birmanie a enregistré une chute de 89,5 % de la valeur de ses importations d’électricité en provenance de Chine, s’établissant à 5,5 millions de dollars US, contre 52 millions de dollars US pour la même période en 2024. Les prix de l’électricité importée sont restés relativement stables entre 2016 et 2023, ce qui suggère que cette baisse n’est pas liée à une diminution des coûts. En 2024, la Birmanie avait importé 82,1 GWh d’électricité de Chine, principalement destinée aux États du nord du pays, Shan et Kachin. Cette électricité servait notamment à alimenter les entreprises et les infrastructures chinoises situées dans les zones économiques spéciales. Il est à noter que ces zones, en particulier les centres logistiques de Muse et Chinshwehaw, sont au cœur d’une offensive menée par plusieurs groupes armés ethniques depuis fin 2023.
Min Aung Hlaing a récemment mis en doute les prévisions économiques de la Banque Mondiale pour la Birmanie, les jugeant « inexactes et incomplètes ». La Banque Mondiale avait pourtant estimé le mois dernier que l’économie birmane devrait se contracter de 2,5 % au cours de l’exercice fiscal 2025/2026, principalement en raison du séisme dévastateur de magnitude 7,7 survenu en mars. Lors de la réunion de coordination du développement économique national, Min Aung Hlaing a affirmé que le PIB birman s’élevait à 76,4 milliards de dollars en 2024-2025 et visait 81,6 milliards de dollars pour 2025-2026, soit une augmentation de 5,2 milliards de dollars.
La Fédération des Entrepreneurs de l’Or de Birmanie (FMGEA) exige que les boutiques d’or passent à un système de pesée numérique respectant la mesure officielle de 16,329325 grammes par tical d’or pur. Les commerçants qui ne se conformeront pas à cette règle s’exposeront à des sanctions strictes. Lors d’une réunion le 3 juillet, plusieurs distributeurs agréés de balances numériques ont été instruits de respecter ces normes. Des inspections seront bientôt menées dans chaque district. La FMGEA encourage donc les commerçants à acheter leurs équipements auprès des fournisseurs autorisés. La mesure officielle repose sur un tical équivalant à 16,329325 grammes, avec un prix de référence fixé à 5,89 millions de kyats par tical. Le non-respect de ces consignes entraînera des poursuites, notamment à Yangon où les autorités ont rappelé l’importance d’obtenir une licence obligatoire pour le commerce de l’or, incluant les boutiques, raffineries et plateformes en ligne. La vente d’or en ligne ou par systèmes de tirage au sort est interdite. Les commerçants doivent se conformer aux prix de référence pour assurer la stabilité du marché.
Société
À l’occasion de la Journée de la femme birmane, le 3 juillet, le chef de la junte Min Aung Hlaing a remis des distinctions honorifiques à plusieurs centaines de femmes, dont son épouse Kyu Kyu Hla. Parmi les lauréates figuraient des militantes, des artistes et des fonctionnaires, certaines jouant un rôle clé dans la société, marquant une rupture avec la tradition réservée aux proches du régime. Min Aung Hlaing a salué leurs contributions exceptionnelles dans leurs domaines.
Un influenceur indonésien de 33 ans, identifié par les initiales A.P., a été condamné à sept ans de prison en Birmanie pour avoir rencontré des groupes rebelles. Arrêté en décembre, il a été jugé pour violations des lois sur le terrorisme, l’immigration et l’association illégale. Il est actuellement détenu à la prison d’Insein, à Rangoun.
Répression, conflit
Les forces de résistance de Karenni affirment avoir abattu un avion de chasse du régime birman qui avait disparu le 1er juillet lors de leur offensive dans la ville de Hpasawng, dans l’État de Karenni (Kayah). La Force de défense des nationalités de Karenni (KNDF) a fait cette déclaration après avoir signalé la découverte de débris d’un avion de guerre près d’un village à la frontière avec la région de Bago. L’avion de chasse FTC-2000G avait perdu le contact avec sa base le 1er juillet au soir, alors que les combattants de la résistance attaquaient les quartiers généraux des Bataillons d’infanterie 134 et 135 de la junte à Hpasawng, qui bénéficiaient d’un soutien aérien.
Plus de 12 000 personnes déplacées dans la région de Sagaing, déjà frappée par le séisme de mars, ont un besoin urgent de nourriture et d’abris. Fuyant les offensives menées depuis la mi-juin par l’armée birmane et les milices alliées, les habitants de plus de 30 villages vivent en exil depuis plus de deux semaines, alors que les combats s’intensifient autour de Mingun et le long de la route Sagaing–Shwebo.
Le régime militaire birman a repris Mobye, ville-clé du sud de l’État Shan, à l’issue d’une vaste offensive menée avec l’appui de l’aviation, de drones et de l’artillerie. Contrôlée depuis janvier 2024 par les forces de résistance karennis, cette localité se trouve sur l’axe routier menant à Loikaw, capitale de l’État de Karenni. La perte de Mobye, défendue au prix d’environ 40 morts côté résistance en juin, marque un revers stratégique pour les groupes anti-junte.
Les forces de résistance Karenni annoncent avoir pris le contrôle de deux bataillons de la junte dans la ville stratégique de Hpasawng, dans l’État de Karenni, après plus d’une semaine de combats intenses. Elles revendiquent également la destruction d’un avion de chasse du régime, un FTC-2000G, lors des affrontements. La capture de Hpasawng ouvre la voie à une progression vers Bawlakhe, autre bastion militaire de la région.
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