
Notre amie Sophie Boisseau du Rocher, chercheuse réputée, vient de publier cet article dans la revue « Politique étrangère » de l’IFRI. En voici l’introduction.
L’Asie du Sud-Est entre Chine et États-Unis : la stratégie du non-choix ?
Un jeu d’équilibre subtil entre deux puissances
On lit souvent que, très sollicités pour leur localisation et leur potentiel, les pays d’Asie du Sud-Est (ASE) louvoient entre deux grandes puissances, la Chine et les États-Unis, proches de la première pour des raisons économiques et de la seconde pour leur sécurité. La réalité est toutefois plus complexe et nuancée. Les pays d’ASE ont cherché à ne pas prendre parti pour l’une ou l’autre puissance ; et leur capacité à tirer le meilleur bénéfice possible de leurs relations bilatérales a été l’une des clés de leur réussite économique et de leur stabilité. En réalité, ils ont jusqu’ici été les grands bénéficiaires de la rivalité sino-américaine.
Un choix assumé du multilatéralisme
Les États de la région ont réussi à tirer parti de la mondialisation et des liens qu’ils ont tissés non seulement avec la Chine et les États-Unis, mais aussi avec d’autres partenaires majeurs : le Japon, les pays européens, et, dans une moindre mesure, l’Australie, la Corée du Sud ou l’Inde.
Le secret de leur succès économique réside dans leur positionnement en faveur de l’ouverture et du multilatéralisme, ainsi que dans leur intégration dans les chaînes de valeur mondiales. Ce choix du multilatéralisme se manifeste également sur le plan diplomatique. Leur devise, déjà illustrée pendant la guerre froide, pourrait se résumer ainsi : « Ne nous demandez pas de choisir. »
Le retour de Donald Trump : une donne bouleversée
Le retour de Donald Trump pourrait cependant changer la donne et rendre l’exercice d’équilibriste plus périlleux. L’offensive massive lancée par le président américain contre le système commercial multilatéral, ainsi que son obsession de réduire le déficit commercial des États-Unis — même envers des partenaires alliés — risquent de modifier les calculs des pays d’ASE.
Vers une diversification des partenariats ?
Plutôt que de se tourner précipitamment vers le grand voisin chinois, les pays d’Asie du Sud-Est pourraient choisir de multiplier leurs options et d’élargir leur palette de partenaires. Cette stratégie viserait à maintenir leur marge d’autonomie, éviter une dépendance trop forte à l’égard d’une seule puissance et conserver une position d’équilibre dans un environnement stratégique de plus en plus polarisé.
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