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BIRMANIE – FRANCE : Soutenir les victimes du conflit Birman, une mission française

Date de publication : 23/12/2025
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Une chronique birmane de François Guilbert

 

Le 17 décembre, après les questions au gouvernement, l’Assemblée nationale a examiné un projet de loi autorisant une convention de coopération judiciaire internationale liant la République française à l’Organisation des Nations unies, et plus précisément à son Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar (IIMM). Endossé par la commission des affaires étrangères du Palais Bourbon le 3 décembre, le texte discuté en séance a été une nouvelle fois agréé à l’unanimité des parlementaires et de leurs groupes. Pas une voix n’a manqué au soutien d’un document aussi technique que politique et moral, puisqu’il est consacré à la facilitation d’enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en Birmanie et à l’aide au jugement de ceux qui en sont responsables.

 

Un accord voté à l’unanimité à l’Assemblée nationale

 

Un rare moment de concorde nationale, à l’heure où la classe politique ne cesse de se déchirer sur la plupart des sujets de politique étrangère. Le consensus sur la défense des droits humains en Birmanie est si fort qu’il ne fait guère de doute, pour les observateurs des arcanes du pouvoir législatif, que l’accord sera confirmé de la même manière lorsqu’il sera présenté au Sénat au début de l’année 2026. Il entrera donc rapidement en vigueur et constituera un nouvel instrument de procédure pour lutter contre l’impunité des crimes les plus graves commis en Birmanie depuis 2011.

 

Un outil juridique au service des victimes rohingyas et du coup d’État de 2021

 

Le Mécanisme d’enquête indépendant pour le Myanmar a été créé par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies en septembre 2018. Ses soixante-dix agents ont pour mission de recueillir des éléments de preuve, de les consolider, de les conserver et de les analyser afin de constituer des dossiers en vue de faciliter et d’accélérer des poursuites pénales équitables et indépendantes, conformément aux normes du droit international, devant les juridictions nationales, régionales ou internationales qui ont ou pourraient avoir à l’avenir compétence sur ces crimes.

 

Chaque année, l’IIMM publie un rapport de ses activités. À ce récapitulatif se sont ajoutées des recherches ciblées et très documentées. Une première étude a détaillé, par exemple, les actions sous couverture de l’armée birmane sur Facebook, celle-ci ayant systématiquement diffusé des discours de haine contre les Rohingyas lors des opérations de nettoyage ethnique de 2017. Le second rapport a, lui, mis au grand jour les crimes sexuels et sexistes commis par les forces de sécurité contre les Rohingyas. Si l’attention portée au sort des Rohingyas a été constitutive de l’IIMM, elle n’en est pas le seul objet depuis des années.

 

Des crimes documentés depuis le coup d’État militaire

 

Si le Mécanisme a été institué en 2019 pour lutter contre les crimes de masse commis à l’encontre des musulmans rohingyas, son mandat va bien au-delà. De jure, il couvre toutes les exactions les plus graves des dernières années. En dépit de moyens limités et en voie de régression (-15 % en 2026), ses constats accablants en attestent.

 

Le dernier rapport, qui a porté sur la période courant du 1er juillet 2024 au 30 juin 2025, a clairement mis en lumière une augmentation continue de la fréquence et de la brutalité des atrocités commises en Birmanie. Preuves à l’appui, il est évoqué des actes de torture dans les centres de détention, notamment les passages à tabac, les chocs électriques, les strangulations, les viols collectifs, les mutilations génitales par brûlure et de nombreuses autres formes de violences sexuelles.

 

Mais, en parallèle de l’établissement des faits, l’IIMM a progressé dans l’identification des personnes impliquées dans des opérations menées dans certains centres de détention et des unités des forces de sécurité auxquelles elles appartiennent. Il a également recueilli des preuves permettant d’identifier les auteurs d’exécutions sommaires de combattants capturés ou de civils accusés d’être des informateurs. La commission des actes répréhensibles ne se limite pas seulement aux forces armées et de police au service du régime militaire de Nay Pyi Taw, et l’IIMM ne se prive pas de le dire.

 

Néanmoins, l’organe des Nations unies s’inquiète aujourd’hui des attaques aériennes contre des écoles, des habitations et des hôpitaux, qui font tant de blessés et de morts parmi les civils. Autant de constats épouvantables rappelés par les députés au nom de leurs groupes politiques lors de la discussion générale sur l’adoption de la convention, et qui ne sauraient rester indéfiniment impunis, à l’image des frappes qui ont endeuillé l’hôpital de Mrauk-U (État Rakhine) dans la soirée du 10 décembre.

 

La coopération internationale, indispensable à la justice

 

Les collaborateurs de l’IIMM n’ayant pas accès au territoire birman, la mise en œuvre de leur mandat dépend très largement de la coopération internationale, et, en premier lieu, des juridictions nationales enquêtant sur ces drames, en raison notamment de leur compétence universelle et de la mobilisation des organisations non gouvernementales avec lesquelles elles sont en relation. Comme l’a rappelé au nom du gouvernement lors des débats Mme Éléonore Caroit, ministre déléguée chargée de la Francophonie, des partenariats internationaux et des Français de l’étranger, il est impératif que la France soit à même de collaborer pleinement avec l’IIMM pour manifester son soutien à la lutte contre l’impunité des crimes.

 

La coopération avec cette institution peut impliquer, de la part de ses partenaires étatiques, la transmission d’informations, l’autorisation de rencontrer des victimes et des témoins se trouvant sur leurs territoires et, le cas échéant, l’autorisation de collecter auprès de ces derniers des documents et des témoignages. Or, en l’état du droit, ce n’est pas jusqu’ici possible.

 

La France renforce son engagement contre l’impunité

 

L’entraide judiciaire prévue par la loi française, aux articles 694 et suivants du Code de procédure pénale, est explicitement réservée aux juridictions (inter)nationales. L’IIMM investigue les crimes de génocide, de guerre et contre l’humanité, mais il n’est pas une cour de justice. Une loi d’approbation est donc indispensable pour permettre aux juridictions françaises de répondre aux demandes légitimes de l’IIMM. Cette mise en ordre du droit pour répondre aux victimes birmanes n’est pas à proprement parler extraordinaire, puisqu’il fallut faire de même pour interagir avec le Mécanisme international, impartial et indépendant pour la Syrie, comme l’atteste le décret n° 2022-1443 du 18 novembre 2022 paru au Journal officiel.

 

Mais, en disposant d’une base juridique solide pour travailler avec l’IIMM, la France se joint aux efforts d’un petit groupe d’États qui n’entend pas oublier l’ampleur des violations systémiques du droit international en Birmanie depuis plus d’une décennie. Si les accords conclus avec l’institution genevoise sont pour la plupart secrets, on sait néanmoins que treize accords de coopération avec des États ont été signés, dont près de la moitié ont été paraphés par des États membres de l’Union européenne. Cependant, l’effet de ces efforts demeure limité. Les États signataires en sont bien conscients. C’est pourquoi leurs promoteurs et soutiens n’entendent pas en rester là.

 

Vers de nouvelles sanctions contre la junte birmane

 

Lors des débats au Palais Bourbon, du rapporteur du projet de loi d’approbation de la convention avec l’IIMM aux rangs de l’opposition, on semble vouloir se montrer offensif vis-à-vis d’une dictature unanimement condamnée. Plusieurs responsables politiques ont en effet rejeté les élections à venir, demandé la libération de la conseillère pour l’État Aung San Suu Kyi et du président de la République, ou encore souhaité un élargissement des mesures restrictives de l’Union européenne, notamment sur les entreprises livrant du kérosène à l’aviation birmane.

 

Plus novateur, à l’initiative du rapporteur, le député UDI Laurent Mazaury, il semble s’esquisser l’idée de remettre sur le métier parlementaire un texte législatif permettant de réprimer spécifiquement la violation des embargos et autres mesures restrictives. L’idée n’est pas à proprement parler nouvelle, puisqu’elle a fait l’objet de débats parlementaires il y a déjà plus de dix ans, mais il reste à savoir si un tel projet peut aboutir lors de la présente législature, alors que le calendrier des assemblées est déjà fort chargé.

 

François Guilbert

 

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