
Une chronique cambodgienne de Yann Moreels
La recherche de celui qui a tiré le premier coup de feu n’a pas de sens au troisième jour du nouveau conflit guerrier, aux yeux des Cambodgiens, puisque l’agression a vraisemblablement reprise avec un drone thaï dégageant des gaz toxiques sur des villageois. Les Khmers ont essayé de l’abattre par des tirs. De fait, il apparaît que l’escalade et son étendue sur plusieurs fronts étaient préméditées.
L’envahisseur n’est pas seulement présent à plusieurs endroits pour effectuer des avancées vers l’est, mais ses engins volants violent également l’espace aérien cambodgien. Ces derniers jours, la plupart des attaques thaïlandaises ont visé les temples khmers, dont certains ont souffert de tirs de mortier. Sur le temple Ta Krabey, c’est un chasseur F-16 de la Royal Thai Air Force qui a lâché ses bombes. Le temple est méconnaissable. D’autres F-16 survolent, en ce mercredi matin, la région de Poipet.
Le ressenti chez les Khmers est immense et ils parlent de crimes contre la culture et le patrimoine de l’humanité
Il faut rappeler que la France, puissance coloniale, a dessiné la frontière bien avant son départ, en relatif accord à l’époque avec les Siamois, derrière toute une rangée de temples, de façon à ce que ceux-ci restent sur le territoire cambodgien, la ligne de séparation étant au-delà et suivant les courbes de niveau.
Une grossière erreur a été faite au fameux temple de Preah Vihear, puisque les superbes ruines se situent au sommet d’une colline située sur le territoire cambodgien, alors que l’accès unique à cette colline et à ce temple se trouvait sur la terre siamoise ! D’où la volonté des Thaïs de revendiquer et d’accaparer par tous les moyens ce temple, alors que la communauté internationale le reconnaît comme étant sur le territoire cambodgien.
Il en va de même de tous les temples, plus ou moins en ruines, le long de la frontière. Les Thaïs revendiquent qu’ils leur appartiennent.
Toutes les zones contestées ont fait l’objet d’attaques planifiées
Hun Sen affirme que le Cambodge n’a pas d’autre choix que de se défendre : défendre à la fois les gens et le territoire contre les assauts du voisin. Onze points différents seraient visés par l’opération de cette attaque militaire, selon les déclarations mêmes du Premier ministre à Bangkok, qui se poursuit le 10 décembre en semblant s’amplifier.
« Nous renforçons nos fortifications », ajoute le président du Sénat, qui a remis son costume militaire de combat, voulant être présent sur les onze points d’attaque de ces envahisseurs.
Conséquence : 100 000 personnes seraient sur les routes pour fuir les combats. Des villageois terrifiés, ne disposant pas de véhicules, cherchent à rejoindre les maisons les plus solides ou de rares bunkers pour se sentir à l’abri. Sur 800 kilomètres de frontière, il n’y a plus de zone sûre.
Les informations sont relayées par un groupe de liaison du ministère de la Défense auprès des observateurs officiels de l’ASEAN, conformément aux dispositions de l’Accord relatif à la Déclaration commune de Kuala Lumpur.
Le gouvernement réitère sa demande aux forces ennemies de revenir au cessez-le-feu et au respect de la Déclaration commune, que le Cambodge continue d’honorer, ne demandant que… la paix.
Yann Moreels
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