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The Book of Chai

Date de publication : 06/08/2024
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Un voyage au pays du thé au lait, une chronique culinaire et sociétale de François Guilbert

 

Le thé au lait épicé est une boisson emblématique du sous-continent indien. Sa couleur chocolatée dense proposée dans les tea shops ou par les vendeurs de rue (chaiwallah) peut laisser croire à l’uniformité du liquide dressé dans un verre ou une tasse en glaise. C’est si vrai que bon nombre de consommateurs occidentaux pensent qu’il n’existe que le massala chai voire, sous l’impulsion de quelques grandes chaînes de distribution, le chai latte. L’auteure et entrepreneure Mira Manek est, elle, capable de vous concocter plus d’une soixantaine de breuvages différents. A ses yeux, le chai est un véritable « lubrifiant social ». Son offre est une marque d’hospitalité, sa consommation l’occasion d’un rituel de plénitude et l’expression de l’identité familiale voire « indienne ».

 

Si aujourd’hui les Indiens sont les plus grands buveurs de thé au monde, le thé au lait est d’un usage assez récent pour ne pas dire du début de XXème siècle. Ce qu’appelle l’historien Arun Chatterjee la « lassification du thé » a commencé autour de 1910 avant de s’intensifier après l’indépendance en 1947 alors qu’elle fut un acte politique contre le colonisateur ; mettre moins de thé dans la tasse était un acte de rébellion pour diminuer les profits des planteurs coloniaux. A contrario, les consommations d’eau chaude épicée (khada) ou à base de lait (ukaro) sont en Inde très très anciennes. Celle qui a tenu un salon de thé à Soho avant de se lancer dans la vente en ligne des mélanges d’épices à associer à un thé chaud au lait, nous raconte tout cela.

 

Aux quatre coins de l’Union indienne

 

Mira Manek explique avec pédagogie et simplicité la culture chai de l’Inde et ses expatriés, la production et son histoire, l’attachement des Bengalis au thé (moins lacté à Calcutta), les déclinaisons communautaires ou régionales (cf. chai rose du Cachemire, thé crémeux parisis, thé au sel de Bhopal, thé noir d’Assam, thé au beurre de yak du Sikkim et du Ladakh), sans parler de la cuisine de rue (dhaba food) qui peut l’agrémenter agréablement (ex. bananes frites (pazhampori), batasa cookies, œuf akuri, lentilles frites (parippu vada), samosa,…). Ce périple « liquide » est l’occasion de découvrir que le chai peut avoir un goût bien différent selon que l’on emploie un thé d’Assam, de Darjeeling, de la montagne Nilgiri, de la région himalayenne de Doars ou de la vallée de Kangra dans l’État de l’Himachal Pradesh.

 

L’auteure nous emmène non seulement aux quatre coins de l’Union indienne mais elle partage son savoir-vivre ayurvédique, son expérience familiale gujarati et, plus encore, ses connaissances et pratiques mixologiques. On apprend à prendre garde au pouvoir de coagulation du gingembre et aux intoxications à la noix de muscade. On se prend à rêver à essayer l’emploi des laits d’amande, de coco ou de soja, des sucres non-raffinés (jaggery) ou de palmier dattier et à user à bon escient le basilic sacré, la cannelle, la cardamome, la citronnelle, les clous de girofle, les graines de fenouil, la noix de muscade ou encore le safran. En disposant des mesures de chaque ingrédient, on peut s’essayer à la réalisation plus ou moins complexe des mélanges. L’index en six pages à la fin du volume permet de retrouver les recettes des breuvages à la théine, quelques mélanges café, infusions, lassis, plats au thé pour le petit-déjeuner ou des snacks et des desserts. Un ouvrage sans illustration des plats mais une mine d’informations pour tous les amoureux du chai.

 

Mira Manek : The Book of Chai, Headline Publishing Group, Londres, 2024, 289 p, 25,9 €

 

François Guilbert

 

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