Une chronique siamoise de Patrick Chesneau
Pour ce qui est du chat siamois, il suffit de demander à sa teerak (tîî lak ou tîî rak, chérie) quelle est la meilleure date astrale pour célébrer wan miaew (ouanne miao, jour du chat)…
L’espèce, au pelage particulièrement soyeux, surtout dans la région de Chiang Mai, est généralement de confession bouddhiste. Elle a au moins neuf vies et se réincarne volontiers en humain. Voilà qui explique pourquoi le nickname Miaew, à la fois sobriquet et petit nom, est donné à de nombreuses jeunes filles thaïlandaises.
À l’instar de ses homologues farang, le minou du bas Mékong miaule, griffe et ronronne, mais avec une tessiture beaucoup plus aigrelette, que l’on retrouve dans le répertoire molam.
Il a un minois typiquement oriental, notamment des yeux en amande, bridés mais jamais abattus. C’est au contraire un petit félin véloce, doté d’une longue queue extrêmement tactile. Un fauve miniature sautillant, sensuel et amateur de caresses, mais attention : il est incommodé par les effusions trop démonstratives en public.
Joueur, enjoué, à la condition de ne pas multiplier inconsidérément les joop joop (djoupe djoupe, bisous et papouilles) au vu et au su de ses congénères. Ça ne se fait tout simplement pas. Affaire de culture et de tradition, de conventions sociales, car la société des chats siamois n’est pas une jungle. Très codifiée. Tout au plus peut-on lui prendre la patte. Ses coussinets, avec griffes rétractiles, sont gage de douceur, mais inutile de vouloir être plus entreprenant : ça s’arrête là dans l’espace commun. Fidèle à son foyer, quoique amoureux de sa liberté, il adopte souvent des postures hiératiques lui conférant une classe indéniable. Une distinction qui lui assure une vraie séduction. Un maintien qui s’accommode tout de même d’un goût marqué pour la distance et le quant-à-soi.
Entre autres caractéristiques, on lui reconnaît un caractère facilement ombrageux si l’on ne cède pas à ses caprices. Il aime le shopping, les marques prestigieuses dans ses actes de consommation courante, le raffinement et même le luxe.
Bref, très thaï-thaï.
Le chat siamois dédaigne les croquettes importées d’Occident, fin gourmet, préférant pour sa diète des boulettes de plaa thalee ou plaa menam (pla talé ou pla méname, poisson de mer ou de rivière) façon moo ping (mou pingue), ces si délicieuses brochettes.
Faut-il ajouter que, pour rester en concordance avec ses origines asiatiques, le chilli (prik en thaï, le piment rouge vif) lui est indispensable ? Un comportement sans doute unique dans le genre des chats terriens.
Pas sûr que tout cela soit parfaitement « chat » (prononcer tchatt, clair en thaï).
En cas d’inexistence d’une teerak dans votre vie ou de sa non-comparution à la barre des témoins, il est toujours possible de s’adresser à ChatGPT, lequel est réputé pour avoir réponse à tout.
Il est vrai que la bestiole numérique abrite un gros robot. Puces de tous les pays, unissez-vous.
Patrick Chesneau
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