
Gavroche a sélectionné pour vous les principales nouvelles de Birmanie cette semaine. Un survol indispensable pour tous ceux qui suivent ce pays d’Asie du Sud-Est.
Politique, Diplomatie
Le dimanche 28 décembre 2025 a marqué le lancement officiel du processus électoral organisé par la junte militaire, près de cinq ans après le coup d’État de février 2021. Cette première phase du scrutin concerne 102 municipalités considérées comme « sécurisées » sur les 330 que compte le pays. Les bureaux de vote ont ouvert sous étroite surveillance, tandis que de vastes zones contrôlées par les groupes de résistance ethniques et les Forces de défense du peuple restent exclues du processus, privant ainsi des millions de citoyens de leur droit de vote.
À l’approche du scrutin, les Nations Unies, via le Haut Commissaire aux droits de l’homme Volker Türk, ont dénoncé coercition et intimidation. Des citoyens seraient contraints de s’inscrire sous peine de se voir refuser documents administratifs essentiels. Dans l’État de Mon, des soldats auraient collecté des bulletins à domicile pour garantir un résultat favorable. La communauté internationale, menée par Antonio Guterres, rappelle que ces élections ne peuvent être considérées comme crédibles tant que la violence contre civils et opposition persiste.
Plusieurs missions internationales d’observation électorale sont arrivées à Rangoun, en provenance notamment de Russie, de Chine, d’Inde, du Kazakhstan, du Cambodge et du Vietnam. Parmi elles figurent le vice-président de la Douma d’État russe Kara-ool Sholban, l’envoyé spécial chinois pour les affaires asiatiques Deng Xijun, l’ancien commandant de l’armée indienne Arun Kumar Sahni, ainsi que des représentants des autorités électorales kazakhes, cambodgiennes et vietnamiennes.
Le 26 décembre, la Commission électorale a détaillé le calendrier du scrutin : après une première phase, une deuxième étape se tiendra le 11 janvier 2026 dans 100 municipalités, avant une dernière phase prévue le 25 janvier. Les opposants estiment que ce découpage vise à masquer la perte de contrôle territorial du régime, l’armée ne dirigeant plus, selon eux, qu’environ un cinquième du pays.
La guerre civile continue : le 25 décembre, une frappe aérienne a visé un camp de déplacés, tuant plusieurs civils. Human Rights Watch note que l’armée intensifie ses tactiques de « terre brûlée » dans Sagaing et Magway, aggravant une crise humanitaire avec plus de trois millions de déplacés.
Des électeurs de plusieurs quartiers de Mandalay affirment avoir été incités par des administrateurs locaux à voter pour le Parti de l’union, de la solidarité et du développement, formation proche de l’armée, selon The Irrawaddy. Le scrutin s’est néanmoins tenu dimanche dans huit des 28 cantons de la région, malgré une attaque nocturne à la roquette artisanale. Deux personnes ont été blessées, a indiqué le chef du gouvernement régional, Myo Aung.
Environ 4 000 personnes ont manifesté pour la deuxième fois à Hpa-an, dans l’État Karen, à moto, en voiture et à pied, pour protester contre les élections organisées par la junte militaire. La mobilisation, menée par la Karen Youth Organization, dénonce un scrutin jugé illégitime et destiné, selon les organisateurs, à maintenir le pouvoir militaire et à poursuivre les exactions contre les populations de toutes les ethnies.
Économie
La Banque mondiale, dans son rapport « Survivre, pas prospérer », dresse un bilan sombre : le PIB devrait se contracter de 2 % pour l’exercice se terminant en mars 2026. La récession est aggravée par le séisme de mars 2025, ayant causé 11 milliards de dollars de dégâts. Seules 45 % des entreprises sinistrées ont repris leur activité.
L’inflation reste critique, avec des prévisions supérieures à 20 %. Les prix du riz et de l’huile fluctuent, combinés à la stagnation des salaires, entraînant une baisse de la consommation de 2 %. La pauvreté urbaine s’aggrave et les pénuries de produits importés freinent l’industrie locale.
La Commission birmane de l’investissement rapporte une chute des investissements internationaux : 72 millions de dollars en 2025 contre 690 millions en 2024, concentrés sur le pétrole et le gaz. Le secteur manufacturier pâtit de l’instabilité politique, laissant la place aux acteurs régionaux moins sensibles aux pressions diplomatiques.
La Birmanie est le premier producteur mondial d’opium, la production de drogues synthétiques progresse et les cyber-arnaques génèrent des flux financiers souterrains, alimentant le conflit et bloquant toute normalisation économique.
La Banque centrale de Birmanie (CBM) a multiplié les interventions sur le marché des changes en décembre afin de soutenir les importations de produits essentiels. Elle a notamment vendu, les 22 et 23 décembre, plus de 1,3 million de dollars aux importateurs d’huile alimentaire et près d’un million de dollars aux importateurs de carburant. Ces opérations s’inscrivent dans une série d’injections régulières de devises en dollars, bahts et yuans depuis octobre, pour des montants cumulés de plusieurs dizaines de millions de dollars, destinées à stabiliser le marché et sécuriser l’approvisionnement du pays.
Société / Répression / Conflit
Les autorités ont renforcé la surveillance sécuritaire à Rangoun et Mandalay. Amnesty International dénonce des arrestations visant des opposants au régime ayant appelé à une « grève silencieuse », tandis que plus de 22 000 prisonniers politiques seraient actuellement détenus dans le pays. L’organisation affirme par ailleurs que toute observation électorale indépendante demeure interdite.
Les forces armées ethniques continuent de progresser : l’Armée pour l’indépendance kachin (KIA) a attaqué la base aérienne de Myitkyina le 25 décembre, tandis que les PDF frappent des postes militaires à Magwe et Chin. Les affrontements montrent que la junte ne contrôle plus que des enclaves urbaines.
Selon Karen News, des opérateurs chinois de réseaux d’escroqueries télécoms — localement appelés zhapian — ont été déplacés de la ville de Kyondoe, dans le township de Kawkareik (État Karen), vers Mawlamyine, capitale de l’État Môn. Ce transfert aurait été effectué par la Force de garde-frontière karen, alliée à la junte, avec l’appui de milices môn, en empruntant la route Kyondoe–Gyaing puis le fleuve Gyaing.
Le 26 décembre, le comité de gestion du camp de déplacés de Sinna Dingda Ginwang a mené une opération d’aide humanitaire en faveur des personnes déplacées internes. Des denrées essentielles et du carburant ont été distribués, dont 500 gallons d’eau et 500 unités de fournitures de base, en coordination avec les responsables communautaires.
De violents affrontements ont opposé, le 24 décembre au matin vers 7 heures, les forces de la junte birmane à des combattants de l’Armée pour l’indépendance kachin (KIA) dans la région de Danai, dans le nord de l’État Kachin. Selon des sources locales, une colonne militaire a été prise pour cible lors de son déplacement, faisant au moins deux morts et quatorze blessés dans les rangs des forces gouvernementales.
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