
Une chronique cambodgienne de Yann Moreels
Le Vice-Premier ministre cambodgien, Prak Sokhon, a été vu sur le front diplomatique durant une semaine, en tant que ministre des Affaires étrangères, négociant sans relâche sur les points de friction sensibles à la frontière entre les deux pays et cherchant à convaincre le gouvernement royal thaï de faire les mêmes pas avant le Sommet de Kuala Lumpur.
Puis ce fut Hun Manet, le Chef du gouvernement royal cambodgien, qui fut pendant trois jours l’homme le plus visible de l’entourage du premier ministre Anwar Ibrahim puis de Donald Trump arrivé dans la capitale malaise pour une signature en grande pompe. Profitant d’un apparent consensus (tout le monde est soudain d’accord comme par hasard ?) avec le premier ministre thaïlandais Anutin Charnvirakul, les signatures officielles pérennisent l’Accord du mois de juillet.
Clairement Hun Manet a profité de son intervention à Kuala Lumpur pour marquer des points au sein du 47ᵉ Sommet de l’ASEAN et de divers partenaires régionaux présents ou observateurs. Les relations diplomatiques du Cambodge s’en trouvent renforcées et donnent au Royaume une image d’un pays stable travaillant – apparemment sincèrement – pour la paix à sa frontière et accessoirement dans toute la région.
Depuis lors, le Cambodge retire visiblement ses équipements guerriers les plus lourds des zones soumises à cessez-le-feu. Ses équipes logistiques entreprennent également de traiter au sol certains points de la frontière pour les déminer et les rendre accessibles à tous. Clairement ceci se fait pour répondre aux demandes des experts militaires et des souhaits de l’équipe des observateurs et ainsi faciliter les négociations avec son cher voisin… qui s’engagerait à en faire autant dans les prochains mois, notamment dans la province d’Oddar Meanchey.
Mais, sur le chemin de la paix entrepris par le premier ministre cambodgien, il n’aura échappé à personne que Kuala Lumpur fut aussi pour lui l’occasion de renforcer le « partenariat » du Cambodge avec la Chine, une stratégie entamée plusieurs mois plus tôt avec le premier ministre chinois LI Qiang, mais mise en valeur à l’occasion du Sommet de l’ASEAN et du projet « Community Vision 2045 » de l’ensemble des partenaires régionaux.
Retour à Phnom Penh avec force – un plan d’action – et confiance en soi. Pas dans les autres. La confiance des autorités gouvernementales ne va pas au-delà des accords signés (Joint Declaration) et de la programmation des efforts de chacun. Le scepticisme reste dans l’air.
Des promesses ?
Qui peut croire que le conflit frontalier entre les deux pays qui dure depuis plusieurs mois, et après cinq jours de combats, va se résoudre en quelques jours, voire en quelques semaines ? Tout le monde l’espère certes mais le scepticisme reste latent avant et après Kuala Lumpur.
La présence militaire thaïlandaise est toujours là sur les points de friction et notamment par empiétement sur le sol cambodgien. Les 18 soldats khmers, détenus comme prisonniers de guerre (ou comme otages pour négociation ?) ne sont toujours pas libérés… et c’est une très forte douleur dans l’opinion publique. Une douleur et une aigreur. Oui, C’est urgent.
Vu du Cambodge, ce serait bien le moment de bouger côté thaï pour cesser les hostilités et les postures ! Et de commencer à respecter les engagements pris à Kuala Lumpur, devant témoins, y compris de la Chine.
L’ASEAN doit aussi intervenir avec ses observateurs, sans plus tarder. Phnom Penh attend avec impatience.
Yann Moreels
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