Les lecteurs de Gavroche suivent avec acuité l’actualité de la région et du conflit frontalier entre le Cambodge et la Thaïlande. La preuve avec ce commentaire, en réponse à l’analyse récente de l’opposant en exil Sam Rainsy.
La lecture de cet article, qui, du point de vue d’un opposant, s’apparente à une tribune, conduit à une première observation : il n’est plus question de temples, ceux-ci ayant été remplacés par des casinos et autres officines générant des fortunes accaparées par des familles complices et mafieuses.
Mais surtout, l’analyse me paraît trop insister sur les racines locales du conflit, réduit à l’accaparement de « butins » extorqués par des voies mafieuses et à grande échelle. La responsabilité en est entièrement attribuée à l’un des camps, ce qui se comprend quand on sait l’implication de l’auteur de la tribune dans la politique intérieure de son pays.
Si la dimension géopolitique du conflit est évoquée, l’analyse en demeure inexistante.
La réunion, en Malaisie, des deux « belligérants » faisait clairement apparaître, en arrière-plan, les représentants américains et chinois. S’agissant de la présence chinoise, cela se comprend au vu de son emplacement géographique et de son importance dans toute la région, mais pourquoi les États-Unis ? La rivalité entre ces deux protagonistes et leurs ambitions dans la région apparaissent comme une donnée déterminante de la situation actuelle — notamment en ce qui concerne la question concomitante et immédiate des droits de douane qui seront imposés aussi bien au Cambodge mais surtout à la Thaïlande, selon le degré de soumission aux USA — et surtout de l’avenir.
Ce ne sont pas les USA qui sont géographiquement dominants et surtout en voie de le devenir dans la région, mais la Chine, une puissance « montante » et une puissance « descendante ».
La Thaïlande, comme souvent dans son histoire, est très exposée, mais sa situation n’est plus celle qu’elle était il y a 50 ans vis-à-vis des États-Unis. Les économies chinoise et thaïlandaise sont fortement connectées et intégrées, notamment du point de vue militaire. Dans le contexte actuel, la Thaïlande fera quelques concessions en faveur des États-Unis (une diplomatie du bambou exprimant par ailleurs une division au sein des élites gouvernementales, entre un versant américain et un versant chinois), le temps que l’étape intermédiaire, favorisant le rôle dominant de la Chine dans la région, soit encore mieux établie, s’il en était besoin.
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