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FRANCE-ASIE: Human Rights Watch interpelle Macron sur la Chine

Journaliste : Redaction
La source : Gavroche
Date de publication : 25/03/2019
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Le directeur de l’organisation internationale de défense des droits de l’homme Human Rights Watch a adressé une lettre solennelle à Emmanuel Macron avant l’arrivée en France samedi 23 mars du président chinois Xi Jinping. Nous reproduisons ce courrier signé Kenneth Roth en intégralité.

 

Monsieur le Président,

 

Je vous écris en vue de la visite du président chinois Xi Jinping en France, du 24 au 26 mars.

 

Xi Jinping a présidé à la pire détérioration de la situation des droits humains en Chine depuis des décennies.

 

Si la France entend jouer un rôle de premier plan à l’échelle mondiale dans la défense des normes internationales en matière de droits humains et de ce que vous avez appelé les « biens communs », tels que la liberté et la justice, les questions relatives aux droits humains devraient avoir leur place dans vos discussions avec le président.

 

Au-delà de leurs propres frontières, les autorités chinoises font pression sur d’autres gouvernements, dont la France, pour le renvoi de force en Chine de demandeurs d’asile et de réfugiés et ont intensifié le harcèlement de certaines communautés de la diaspora chinoise.

 

Pékin détient arbitrairement des étrangers en Chine, y compris le Suédois Gui Minhai, en dehors de toute procédure régulière.

 

La Chine accélère également son initiative « One Belt, One Road », sans garanties en matière de respect des droits humains et du droit du travail, ni consultations avec les communautés affectées, y compris dans les États membres de l’Union européenne.

 

Des résultats peu encourageants

 

La France a exprimé de vives préoccupations sur plusieurs de ces questions, dernièrement dans le cadre de l’Examen périodique universel (EPU) de la Chine au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, mais les résultats ne sont pas encourageants.

 

La France a appelé la Chine à ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, à mettre fin aux détentions arbitraires massives au Xinjiang et à permettre aux experts de l’ONU de s’y rendre sans entraves, ainsi qu’à abolir la peine de mort.

 

La Chine a rejeté chacune de ces propositions.

 

La France a également émis des recommandations concernant les droits des personnes LGBTI, le respect de la liberté de culte au Tibet et au Xinjiang, et les droits humains à Hong Kong.

 

La Chine a prétendu, sans aucun fondement, qu’elle les respectait déjà.

 

Il est essentiel que vous interpeliez publiquement les dirigeants chinois sur ces questions.

 

Il s’agit là de la seule manière de s’assurer que les personnes qui, en Chine, ont le plus besoin d’entendre ces interventions aient connaissance de ce type de plaidoyer.

 

Lorsqu’ils sont interpellés sur les droits humains, les responsables chinois répondent souvent par de vagues garanties.

 

Pour qu’un dialogue constructif et concret sur ces questions puisse avoir lieu, il est nécessaire de soulever des cas précis ou des questions spécifiques et les aborder publiquement.

 

Compte tenu de l’ampleur et de l’échelle des violations commises aujourd’hui par le gouvernement chinois, il serait profondément inapproprié de ne pas soulever publiquement les inquiétudes sérieuses et spécifiques de la France.

 

«Perdre la face»

 

Enfin, l’argument selon lequel les dirigeants chinois n’aimeraient pas « perdre la face » est souvent avancé pour justifier le fait que les gouvernements étrangers ne critiquent pas publiquement leurs abus en matière de droits humains.

 

Si le gouvernement français envisage de poursuivre cette stratégie, je ne peux qu’insister pour que vous accordiez la même attention à la « face », autrement dit aux visages, des innombrables personnes torturées, emprisonnées à tort ou persécutées de toute autre manière par le président Xi et son gouvernement.

 

Pour ces différentes raisons, je vous encourage instamment à saisir l’occasion de votre rencontre avec le Président Xi pour l’appeler publiquement à :

 

– Permettre au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et aux autres représentants de l’ONU un accès réel et sans entraves au Xinjiang, conformément aux récentes demandes de la France et de l’Union européenne

 

– Libérer immédiatement et sans condition les défenseurs des droits humains et les opposants pacifiques détenus injustement, y compris Gui Minhai, Huang Qi, Wang Quanzhang, Guligeina Tashimaimaiti, Ilham Tohti, Tashi Wangchuk, et Li Ming-che

 

– Abolir la peine de mort

 

– Revenir sur la posture anti-droits de la Chine à l’ONU et avec Interpol

 

– À la lumière de la disparition de l’ancien président d’Interpol Meng Hongwei en Chine en 2018, informer les dirigeants chinois que la France va entreprendre un examen approfondi de toute la coopération policière en vue de la suspendre dans les domaines où la Chine ne semble pas disposée à respecter les protections internationales des droits humains.

 

En août 2017, vous avez affirmé que les intérêts diplomatiques et économiques de la France avec la Chine « ne sauraient justifier qu’on recouvre d’un voile pudique la question des droits de l’homme ».

 

Depuis lors, la situation en Chine s’est considérablement aggravée, malgré les dialogues bilatéraux sur les droits humains et les interventions à l’ONU.

 

Vous avez, avec la venue du président chinois en France, l’opportunité de concrétiser votre engagement.

 

Je vous demande avec force de la saisir. Je serais ravi de pouvoir échanger sur ces questions avec vous.

 

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’assurance de ma plus haute considération.

 

Kenneth Roth Directeur exécutif Human Rights Watch

 

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