Bangkok 8

Date de publication : 27/06/2019
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Gavroche, c’est aussi un souci constant de vous apporter quelques lumières sur nos lectures et les auteurs à suivre. Nous l’avons fait en publiant, dès sa sortie, une recension du dernier roman de Jean-Noël Orengo, «les Jungles rouges» (Grasset). Mais notre rôle est aussi de vous aider à bâtir la bibliothèque idéale du passionné d’Asie du sud-est. Et dans cette bibliothèque, John Burdett doit occuper une place de choix !

 

Un homme qui vit entre Bangkok – ses vingt millions d’habitants et ses quartiers chauds de Soi Cowboy et de Nana Plaza – et un village dans le Lot qui ne compte que quelques dizaines d’âmes ne peut pas être un homme tout à fait ordinaire.

 

Il est vrai que John Burdett est Anglais, et que les Anglais ne font jamais rien comme les autres.

 

Ancien avocat, il fuit la Grande-Bretagne à l’arrivée de Margaret Thatcher et s’installe à Hong Kong où il travaille, entre autres, pour le gouvernement local avant de se mettre à son compte. Finalement, il décide d’abandonner le droit et commence une carrière d’auteur de romans policiers.

 

Auteur cosmopolite

 

Les auteurs anglo-saxons sont d’un naturel beaucoup plus cosmopolite que les Français. Il suffit, pour s’en convaincre, de lire Ernest Hemingway, Paul Theroux, Patrick Leigh Fermor, Bruce Chatwin, Wilfred Thesiger, Rudyard Kipling ou E.M Forster.

 

John Burdett, lui, a choisi, la Thaïlande et, plus précisément, Bangkok.

 

Pour pénétrer plus facilement dans la tentaculaire métropole, il s’est créé un double, l’inspecteur Somchaï Jitpleecheep, de la Police Royale, attaché au district 8 de la ville.

 

Somchaï, bouddhiste, se veut totalement incorruptible de façon à pouvoir progresser dans ses réincarnations successives.

 

Il est le fils d’un G.I. qu’il n’a jamais connu et d’une fille de bar de Bangkok rencontrée au cours d’une permission pendant la guerre du Vietnam, excellent moyen pour l’auteur de confronter la culture occidentale, à prétention universelle, avec l’Orient profond et compliqué.

 

Pas de logique occidentale

 

La logique thaï n’est pas celle de l’Occident. Le sexe n’est pas puritain mais joyeux.

 

Les corps ne réclament que le plaisir et les enfants ne demandent qu’à naître, élevés ensuite par l’ensemble de la famille et de la société.

 

Quant à l’argent, il n’est pas synonyme de pouvoir, mais de qualité de vie. La morale chrétienne n’a pas sa place dans ce pays.

 

L’Occident a l’esprit étroit, une spiritualité quasi-nulle et n’est au fond gouverné que par ses instincts les plus bas, pense l’inspecteur.

 

« J’ai eu beau étudier l’esprit occidental pendant des décennies, j’ai du mal à le comprendre, vu de près », déclare le flic dans Bangkok 8.

 

Et il ajoute, un peu plus loin : « Comme la plupart des primitifs, je crois que la moralité provient d’un état d’innocence primordiale à laquelle nous devons rester fidèles si nous ne voulons pas nous perdre complètement ».

 

Prospère industrie du sexe

 

Bien sûr, le genre l’y contraint, les romans de John Burdett – Bangkok 8, Bangkok Tattoo, Bangkok Psycho, Le Parrain de Katmandou, Le Pic du Vautour, Bangkok noir et Le Joker – ont tous pour toile de fond la prospère industrie du sexe et les quartiers chauds de la capitale. L’action y est omniprésente.

 

On y trouve corruption et cynisme politique, sexe et massages, mafias chinoises et immoralisme occidental. Tous constitueront pour le lecteur, une excellente occasion de voir ses propres comportements d’Occidental avec d’autres yeux et, donc, de progresser sur la voie de la sagesse.

 

Né en 1951 à Londres, John Burdett est divorcé et père d’une fille. Il est marié à une Thaïlandaise. En France, ses romans sont pour l’essentiel édités aux « Presses de la Cité », collection « Sang d’encre ».

 

Patrice Montagu-Williams

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