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THAÏLANDE – HISTOIRE : Sunthorn Phu, le Shakespeare siamois

Journaliste : Raymond Vergé
La source : Gavroche
Date de publication : 15/09/2023
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Sunthorn Phu

 

 

Tous les ans, le 26 juin, dans le parc qui porte son nom (Baan Kram, Klaeng, province de Rayong) et dans les écoles de la région, est célébré l’anniversaire de la naissance de Sunthorn Phu, le plus grand des poète thaïlandais du XIXème siècle, reconnu et honoré par l’UNESCO en 1986 à l’occasion de son bicentenaire.

 

Sunthorn Phu, la voix de la nation

 

Né en 1786, juste quatre ans après la fondation de Krungtep (Bangkok) en tant que nouvelle capitale du Siam et le début de la dynastie Chakri (dont il servit les quatre premiers monarques), Sunthorn Phu allait devenir la voix de la nation et l’un de ses buveurs les plus célèbres. Il grandit donc sous le règne de Rama I (1782-1809), mais parvint à la gloire éternelle lorsque, en prison, il se mit à écrire Phra Aphai Mani, un très long poème plein d’aventures qui, publié en feuilleton, devint immédiatement populaire dans le Bangkok de Rama II (1809- 1824), et qui, encore jusqu’à la fin des années 1970, faisait partie du cursus scolaire national.

 

Cette épopée versifiée raconte les péripéties de deux princes, Phra AphaiMani et Srisuwan. Le roi, leur père, les envoie dans la forêt à la recherche de maîtres spirituels qui puissent leur enseigner la sagesse en même temps que l’art de la guerre. Pendant toute cette période, ils observent les anciens préceptes de la tradition indienne en vivant comme des ascètes avec d’autres contemplatifs.

 

Au bout de sept années, ils reviennent auprès de leur père, chacun ayant maîtrisé sa discipline. Phra AphaiMani avait tellement bien appris l’art de la flûte que quiconque entendait ses mélodies tombait dans un profond sommeil. Srisuwan avait si parfaitement pratiqué la danse avec un bâton qu’il pouvait défaire quiconque essayait de l’agresser.

 

Malheureusement, le roi fut très déçu qu’ils n’aient pas suivi une formation leur permettant de lui succéder sur le trône et il les bannit de son royaume. Les deux frères passèrent le reste de leur vie à errer à travers l’Asie, mais leurs connaissances se révélèrent précieuses chaque fois qu’ils eurent des ennuis.

 

Après bien des aventures dignes des grandes épopées hindoues, Phra Aphai Mani décidera de finir sa vie comme ermite dans la forêt. Sunthorn Phu composa d’autres œuvres et d’autres poèmes, ainsi que des berceuses pour les enfants de sang royal.

 

Un poète ne peut échapper à l’alcool

 

Mais le texte qui résume le mieux sa vie mouvementée est celui intitulé : « Un poète ne peut échapper à l’alcool ». Ces treize courtes lignes pourraient constituer sa biographie : « Me voici à la distillerie, un poêle fumant sous un seau accroché à la corde d’une perche. Ô Destinée, à cause de cette eau perfide, je suis ivre, fou et honteux. Je devrais me repentir et me libérer afin d’être plus fort devant l’alcool, ne plus m’en approcher ou le voir. Mais quand je ne suis pas ivre de vin, je suis malade d’amour. Comment mettre un terme à la tentation ? La migraine disparaît bien vite, mais le chagrin d’amour dure toujours. »

 

Ses beuveries pouvaient être si extrêmes qu’une fois il fut emprisonné pour avoir blessé un de ses cousins au terme d’une séance particulièrement violente. Il connut aussi le cachot pour ce qui est le fléau des poètes romantiques : la passion amoureuse, ayant eu une aventure avec une jeune femme du nom de Chand, camériste à la cour de Rama II. Lorsque cela se sut, l’élégiaque fut arrêté et jeté en prison. Néanmoins, sa popularité était telle que le monarque lui pardonna l’offense et le fit libérer. Les amants eurent finalement la permission de se marier. Malgré son alcoolisme, Sunthorn Phu vécu jusqu’à l’âge de 69 ans, un record pour l’époque.

 

Raymond Vergé

 

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1 COMMENTAIRE

  1. Un chercheur de l’institut de l’évolution humaine de Johannesburg émettait l’hypothèse, en 2001, que les Sonnets 155,156,157 du Poète, dont la majorité sont adressés à un jeune homme, faisaient mention du terme “cannabis sativa” et était persuadé que le dramaturge était mort, plutôt jeune, d’overdose. Un étude approfondie des pipes à tabac de l’auteur de Roméo et Juliette, exhumées dans son jardin de stratford-upon-Avon montrait qu’elle contenaient des traces de cannabis. De son rôle bénéfique sur la production poétique, de nombreux maîtres en attestent. Il ne fut que l’un des adjuvants de la création littéraire. Le haschisch, l’absinthe et l’opium (Baudelaire), l’absinthe (Verlaine, Rimbaud n’était pas en reste), la mescaline (Michaux, Sartre), la morphine (Nabokov, Bougakov), le LSD (Aldous Huxley), l’alcool plus souvent (Musset, Fitzgerald, Faulkner, EA Poe, Kerouac, Joyce, Hemingway, Capote ….) Je me plais à penser que les deux dispensaires (sic) à “weed” qui viennent d’ouvrir dans ma rue (plutôt éloignée du trépidant Bangkok), vont générer une nouvelle école de poésie …

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