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THAÏLANDE – CAMBODGE : Retour sur le contentieux frontalier du temps de Preah Vihear

Date de publication : 25/07/2025
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La frontière entre la Thaïlande et le Cambodge est de nouveau le théâtre d’affrontements meurtriers, ravivant les tensions autour du temple de Preah Vihear, un site antique dont la souveraineté est un point de discorde depuis des décennies. Il est donc essentiel de comprendre les racines historiques de ce conflit qui continue de déstabiliser la région, défiant même les décisions de la plus haute juridiction internationale.

 

Au cœur des récentes violences se trouve le temple de Preah Vihear, un chef-d’œuvre architectural du XIe siècle, dédié à Shiva, perché sur un promontoire de la chaîne des monts Dangrek. Sa position géographique offre une vue imprenable sur la plaine cambodgienne, mais c’est aussi cette situation stratégique qui en a fait un point de friction persistant entre les deux nations.

 

Le différend frontalier trouve ses racines profondes dans l’époque coloniale et la délimitation des frontières entre le Siam (l’actuelle Thaïlande) et l’Indochine française, dont le Cambodge était alors un protectorat. Les Traités franco-siamois de 1904 et 1907 sont les instruments clés de cette démarcation. Ces accords prévoyaient que la frontière terrestre devait suivre la ligne de partage des eaux dans la chaîne des monts Dangrek. Une commission mixte franco-siamoise fut chargée de cette tâche complexe.

 

C’est là qu’entre en scène la fameuse carte de l’Annexe I de 1907. Produite par les autorités françaises, cette série de cartes plaçait explicitement le temple de Préah Vihéar du côté cambodgien de la frontière. Si le Cambodge a toujours considéré cette carte comme la référence faisant foi, la Thaïlande a, elle, constamment remis en question sa validité contraignante, affirmant qu’elle n’avait jamais été formellement acceptée par le Siam. Bangkok a toujours soutenu que le principe de la ligne de partage des eaux devait prévaloir, ce qui, selon son interprétation, placerait le temple en territoire thaïlandais.

 

La cour internationale de justice tranche… en 1962

 

Après l’indépendance du Cambodge en 1953, le différend a refait surface, culminant en une saisine de la Cour Internationale de Justice (CIJ) de La Haye par le Cambodge en 1959.

 

Les arguments du Cambodge : Phnom Penh a plaidé que les traités franco-siamois et, surtout, la carte de 1907, prouvaient sa souveraineté. Le Cambodge a souligné que la Thaïlande avait implicitement reconnu le tracé de cette carte par son inaction et son absence de protestation pendant des décennies, notamment en utilisant des copies de la carte à diverses fins officielles sans jamais la contester formellement.

 

Les arguments de la Thaïlande : Bangkok a maintenu que la carte n’était pas contraignante et que le véritable critère devait être la ligne de partage des eaux, qu’elle estimait passer au nord du temple. Elle a également avancé des arguments d’ordre historique, affirmant que le temple avait été sous le contrôle siamois pendant de longues périodes.

 

Dans son arrêt retentissant du 15 juin 1962, la CIJ a rendu une décision historique qui allait marquer l’histoire des relations internationales. Par neuf voix contre trois, la Cour a donné raison au Cambodge, déclarant que la souveraineté sur le temple de Préah Vihéar appartenait au Cambodge. Plus important encore, la CIJ a fondé sa décision sur le principe de l’acquiescement et de l’estoppel en droit international. La Cour a estimé que la Thaïlande avait, par son comportement et son absence de protestation explicite contre la carte de 1907 pendant une période significative, tacitement accepté la ligne frontalière telle qu’elle y était représentée. En conséquence, la Thaïlande ne pouvait plus revenir sur cette acceptation implicite. L’arrêt a également ordonné à la Thaïlande de retirer toutes ses forces armées et de police du site.

 

Des tensions persistantes et des affrontements répétés

 

Bien que l’arrêt de 1962 ait été juridiquement contraignant et ait été initialement accepté, au moins en façade, par les deux pays, il n’a malheureusement pas apaisé toutes les revendications autour de la zone environnante. Le problème est que l’arrêt ne délimitait pas l’intégralité de la frontière entre les deux pays, mais se concentrait spécifiquement sur la souveraineté du temple et de son promontoire. La zone adjacente est restée contestée, alimentant un nationalisme ardent des deux côtés.

 

Les tensions sont restées latentes pendant des décennies, mais ont refait surface avec une intensité dramatique en 2008, lorsque l’UNESCO a inscrit le temple de Preah Vihear au patrimoine mondial de l’humanité, à la demande du Cambodge. Bien que la Thaïlande ait initialement donné son accord pour l’inscription du temple seul, elle a vivement protesté contre l’inclusion de la “zone environnante” dans la demande cambodgienne, y voyant une tentative d’empiètement territorial. Cette décision de l’UNESCO a servi de catalyseur, ravivant les passions nationalistes et conduisant à des affrontements armés sporadiques et meurtriers le long de la frontière entre 2008 et 2011. Ces combats ont fait des dizaines de victimes, tant militaires que civiles, et ont entraîné le déplacement de dizaines de milliers de personnes des deux côtés de la frontière.

 

Face à cette escalade, le Cambodge a de nouveau sollicité la CIJ en 2011, demandant une interprétation plus précise de son arrêt de 1962, notamment concernant l’étendue de la “zone environnante” sur laquelle le Cambodge pouvait revendiquer sa souveraineté. Le 11 novembre 2013, la CIJ a rendu un nouvel arrêt, clarifiant sa décision initiale. La Cour a réaffirmé que le Cambodge avait la souveraineté sur “l’ensemble du territoire du promontoire de Preah Vihear”, y compris une zone litigieuse en contrebas du temple d’environ 4,6 km². La CIJ a une fois de plus ordonné à la Thaïlande de retirer tout personnel militaire ou de police de cette zone élargie.

 

La France, en tant qu’ancienne puissance coloniale et auteure des cartes de délimitation, se trouve souvent au centre de ce débat, parfois sollicitée pour son expertise historique et ses archives. Des acteurs régionaux comme l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), dont la Malaisie assure actuellement la présidence tournante, ont également appelé à la retenue et au dialogue, cherchant à désamorcer la crise par des voies diplomatiques. Toutefois, la force des sentiments nationalistes et la complexité de l’interprétation des frontières rendent toute résolution durable particulièrement ardue.

 

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