Le projet de loi visant à légaliser les casinos au sein de complexes de loisirs se transforme en véritable casse-tête politique pour le gouvernement Pheu Thai. Alors que le texte devait être examiné en première lecture à la Chambre des représentants le 9 avril, la volonté du gouvernement d’accélérer les débats a suscité une levée de boucliers, forçant le report à la prochaine session parlementaire, prévue le 2 juillet.
La Première ministre Paetongtarn Shinawatra a affirmé que le projet n’avait pas été abandonné, mais que le gouvernement devait donner la priorité à d’autres urgences, comme la question des droits de douane avec les États-Unis. Elle a assuré que l’exécutif poursuivrait les consultations publiques et clarifierait les objectifs du texte, qui prévoit notamment l’intégration de casinos dans de vastes complexes de divertissement.
Face à cela, les opposants exigent le retrait pur et simple du projet.
L’avenir du texte pourrait profondément bouleverser l’équilibre de la coalition gouvernementale. Si le gouvernement choisit de temporiser, misant sur une opinion publique mieux préparée, il pourrait traverser la fin du mandat sans contestation majeure, à condition que sa stratégie économique produise des résultats visibles. En revanche, s’il pousse le projet en s’appuyant sur l’ensemble de la coalition, il devra affronter une opposition déterminée, et chaque parti allié, notamment Pheu Thai et Bhumjaithai, devra renforcer sa cohésion pour limiter l’érosion de sa base électorale.
Une troisième option consisterait pour Bhumjaithai à prendre ses distances avec le texte, ce qui priverait Pheu Thai d’une majorité stable à la Chambre et l’obligerait à négocier avec de plus petits partis pour achever son mandat. Mais ce scénario pèserait aussi lourdement sur Bhumjaithai, qui contrôle actuellement le ministère de l’Intérieur.
En quittant la coalition, il perdrait à la fois un levier d’influence majeur et ses précieuses alliances locales. Le dilemme est d’autant plus complexe que le secrétaire général du parti, Chaichanok Chidchob, a publiquement exprimé son opposition aux casinos. En maintenant cette position, il affaiblit la cohésion gouvernementale ; en y renonçant, il s’expose à des accusations d’incohérence. Le chef du parti, Anutin Charnvirakul, qui se présente comme un leader conservateur, devra lui aussi affronter les critiques s’il soutient une mesure perçue comme moralement controversée.
Thanaporn Sriyakul, directeur de l’Institut d’analyse politique et des politiques publiques, estime que Bhumjaithai a plus à perdre qu’à gagner, quelle que soit sa position. Il pense cependant que Pheu Thai assumera le risque, convaincu que les bénéfices à long terme surpassent les obstacles politiques.
Adopté par le cabinet le 27 mars, le projet de loi s’inscrit dans une stratégie de relance économique visant à diversifier les sources de revenus du pays. Le gouvernement espère générer entre 119 et 283 milliards de bahts par an et attirer 5 à 10 % de visiteurs étrangers supplémentaires. Les complexes comprendraient principalement des salles de concert, des arènes sportives, des parcs aquatiques et des hôtels, tandis que les casinos occuperaient moins de 10 % de l’espace total.
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