Par la rédaction économique de Gavroche, d’après l’analyse de GEM FI & FX Strategy
Alors que la Thaïlande traverse une nouvelle zone de turbulences politiques avec la Cour constitutionnelle qui a suspendu la Première ministre Paetongtarn Shinawatra, les marchés réagissent avec prudence. Si le climat d’incertitude pèse sur les perspectives économiques, les analystes estiment que les taux d’intérêt reflètent déjà une grande partie du risque. Le baht thaïlandais, de son côté, reste vulnérable face au dollar américain, même si les risques de fuite de capitaux demeurent limités.
Une incertitude politique qui s’installe
En suspendant la Première ministre, la Cour constitutionnelle a créé un vide institutionnel. Sans solution rapide – comme le rétablissement de Paetongtarn Shinawatra, la désignation d’un nouveau chef de gouvernement ou la recomposition de la coalition – le pays pourrait devoir convoquer des élections anticipées. Un tel scénario prolongerait l’instabilité pendant plusieurs mois, comme l’ont montré les élections générales de 2023, avec à la clé des retards possibles dans l’adoption du budget et les mesures de relance.
Les taux d’intérêt intègrent déjà le risque
Les marchés obligataires ont déjà intégré ce contexte défavorable. La courbe des taux thaïlandais s’est aplatie au fil des mois, signe que les investisseurs ont revu à la baisse leurs anticipations de croissance. Le gouvernement a réduit la portée de ses annonces de relance pour réorienter ses dépenses vers l’investissement et le soutien aux exportateurs, ce qui a renforcé les anticipations de baisses de taux.
À court terme, les opérateurs de marché anticipent une baisse du taux directeur vers 1 % d’ici mi-2026, un niveau historiquement bas. Ils tablent sur deux réductions supplémentaires d’ici fin 2025. Malgré les incertitudes politiques, les marchés ne croient pas que la Banque de Thaïlande réduira encore davantage son taux terminal, sauf en cas de fortes déceptions sur les données économiques.
La Banque centrale a récemment relevé ses prévisions de croissance et affiché sa volonté de préserver sa marge de manœuvre. Le futur gouverneur, dont la première décision est attendue en octobre, jouera un rôle clé dans l’orientation de la politique monétaire.
Le baht reste sous pression, sans provoquer de panique
Sur le marché des changes, le baht reste relativement stable mais sous-performe par rapport à ses voisins asiatiques. L’instabilité politique et les lenteurs dans les négociations commerciales – en particulier pour protéger le secteur agricole – affectent la devise.
Cependant, la Thaïlande a l’habitude des crises politiques. Une croissance ralentie pourrait même ralentir les importations, réduisant ainsi le déficit courant. Depuis plusieurs années, les investisseurs étrangers ont sous-investi dans les actifs thaïlandais, ce qui réduit aujourd’hui le risque de fuite de capitaux. D’après l’évolution des taux à court terme sur le marché des changes, les investisseurs semblent déjà avoir pris des positions à la baisse sur le baht.
Le facteur déterminant reste néanmoins l’évolution du dollar américain. Si le billet vert se maintient ou se renforce, le baht pourrait continuer de se déprécier. En revanche, une baisse du dollar offrirait une bouffée d’oxygène à la devise thaïlandaise.
Chaque semaine, recevez Gavroche Hebdo. Inscrivez vous en cliquant ici.
