Home Asie Asean PHILIPPINES – POLITIQUE : La police de l’archipel de plus en plus dans les mains du président Duterte

PHILIPPINES – POLITIQUE : La police de l’archipel de plus en plus dans les mains du président Duterte

Journaliste : Rédaction
La source : Gavroche
Date de publication : 02/07/2021
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En mai dernier, le gouvernement philippin a confirmé la nomination du lieutenant général Guillermo Eleazar au poste de chef de la police du pays. Il succède au général Debold Sinas, qui a atteint l’âge de la retraite obligatoire de 56 ans. La nomination d’Eleazar intervient à un moment critique de l’administration de l’homme fort qu’est le président Rodrigo Duterte.

 

Une bâche portant le visage de Lilibeth Valdez, la femme de 52 ans tuée par balle par un policier alors qu’il n’était pas en service, est accrochée sur la tombe où elle repose au cimetière de Bagbag, à Quezon City, aux Philippines, le 4 juin 2021.

 

Guerre brutale contre la drogue

 

Outre la mise en œuvre de la guerre brutale de Duterte contre la drogue, la police nationale philippine (PNP) joue également un rôle crucial dans la gestion par le gouvernement de la pandémie de COVID-19. La police a également été instrumentalisée pour étendre les pouvoirs présidentiels et consolider un régime illibéral. Pendant la pandémie, la PNP a déployé une force excessive contre les manifestants et les communautés marginalisées et a reçu l’ordre de Duterte d’abattre les fauteurs de troubles. Le nombre d’attaques perpétrées tant par des assaillants non identifiés que par les forces de sécurité de l’État, comme l’explique Human Rights Watch, a augmenté pendant la pandémie.

 

Étiquettes rouges

 

Récemment, la police a apposé des étiquettes rouges – c’est-à-dire qu’elle a mis des groupes sur une liste noire en les étiquetant comme communistes – sur les ” magasins communautaires ” qui aident les personnes défavorisées à obtenir de la nourriture. Des unités de police auraient patrouillé dans les banques alimentaires et établi un lien entre les organisateurs et le mouvement communiste, mettant ainsi leur vie en danger. Bien que M. Sinas ait nié l’existence d’ordres émanant du siège national et visant à surveiller et à profiler les garde-manger communautaires, il est difficile de prendre ses propos pour argent comptant.

 

À l’ère des médias sociaux, le PNP a également utilisé les plateformes numériques pour vilipender les médias et répandre la peur et la désinformation à l’égard des manifestants, des personnalités publiques et des politiciens de l’opposition. Avec la loi antiterroriste controversée de 2020 également en vigueur, le nouveau chef de la PNP aura certainement beaucoup à gérer.

 

Tristement célèbre

 

Certains prétendent qu’Eleazar pourrait bénéficier du remplacement d’un chef de police impopulaire. Avant d’occuper le poste de chef de la police, M. Sinas était tristement célèbre pour ses célébrations d’anniversaire au plus fort des restrictions du COVID-19. En tant que chef de la police de la région de la capitale nationale (RCN), M. Sinas a organisé une fête très courue le 8 mai 2020 au siège de la police de la RCN. Les internautes ont créé des mèmes satiriques pour exprimer leur indignation face à cette fête d’anniversaire irréfléchie.

 

Malgré le mépris flagrant des restrictions liées à la pandémie, le général Archie Gamboa, alors chef de la PNP, a défendu Sinas contre les nombreuses critiques et a affirmé qu’il ne s’agissait pas d’une fête mais seulement d’une mañanita, une sérénade au petit-déjeuner. Il a également affirmé que Sinas resterait chef de la police de la RCN car il était “difficile à remplacer”. Duterte a ensuite blanchi Sinas de toute infraction et l’a finalement nommé au poste le plus élevé de l’institution six mois plus tard.

 

Culture de l’impunité

 

De telles réponses de la part de hauts responsables du gouvernement sont décevantes mais peu surprenantes. Après tout, le paysage sociopolitique des Philippines est depuis longtemps assailli par une culture de l’impunité. Les malfaiteurs sont récompensés au lieu de faire l’objet d’une enquête et de poursuites légales s’ils sont des figures d’autorité ou des affiliés de ces figures.

 

Eleazar devra non seulement faire régner la loi et l’ordre, mais aussi mettre en œuvre des politiques visant à améliorer la réputation ternie de la PNP et à réduire les maux institutionnels qui affligent cette force de police de 220 000 hommes. Répondre aux préoccupations du public concernant la nouvelle loi antiterroriste, mettre fin à la guerre sanglante contre la drogue et aux dangereuses activités de marquage rouge, améliorer les capacités organisationnelles de la PNP contre les menaces non traditionnelles et demander des comptes aux officiers délinquants devraient figurer en bonne place sur la liste des tâches d’Eleazar. La réalisation de ces tâches peut s’avérer difficile compte tenu de la nature du régime de Duterte, où la PNP est principalement mobilisée pour faire prévaloir “l’ordre sur la loi” et servir de “bourreaux volontaires du président”.

 

Remerciements à Michel Prévot

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