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Thaïlande : la justice du double standard

Journaliste : Redaction
La source : Gavroche
Date de publication : 03/11/2013
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Ils sont jeunes, pas toujours beaux mais toujours riches, roulent en Porche, Benz ou Ferrari et portent des noms qui font frémir d’admiration, ou de peur, ceux qui croisent leur chemin. Héritiers de familles « influentes » – appelons-les « gosses de riches » pour simplifier – ils sont aussi les héritiers d’un système dit du « double standard », où la justice ne s’appliquerait pas de la même façon pour tout le monde, surtout pour ceux d’en haut…

 

La plupart des Thaïlandais en sont convaincus : ici, les personnes influentes vont rarement en prison. Elles ont de l’argent pour se défendre et l’argent fait la loi. Souvent cités en référence, ces gosses de riches impliqués dans des homicides et qui échappent à la prison. Des affaires très médiatisées qui reflètent un sentiment général d’impunité à peine voilé.

Duangchalerm, le fils de Chalerm Yoobamrung, l’un des hommes forts du gouvernement actuel, accusé d’avoir tué un policier en civil lors d’une bagarre dans une discothèque en 2001, avait bénéficié d’un non-lieu pour manque de preuve. En « fuite » à l’étranger pendant plus d’un an, il s’était livré à la police après avoir eu le temps de préparer sa défense. Connus lui et son frère pour leurs frasques violentes lors de leurs sorties nocturnes et lui-même inculpé à onze reprises, le dossier d’accusation s’est effondré lorsque les témoins se sont rétractés lors du procès. D’autres pièces à conviction auraient également disparu.

Autre affaire retentissante et toujours en cours, celle de Vorayudh Yoovidhyas, le petit fils du fondateur de Red Bull, accusé d’avoir tué involontairement un policier qu’il a percuté avec sa Ferrari à… 170 km/h sur Sukhumvit, l’artère principale du centre de Bangkok.

 

Après avoir tenté, en vain, de faire passer son chauffeur pour le conducteur, il a pu quitter le pays avant d’être mis en examen. Il est aujourd’hui sous le coup d’un mandat d’arrêt. D’aucuns sont persuadés qu’il suivra les traces du fils de Chalerm, et ne fera jamais de prison.

Un ressentiment confirmé par une autre affaire qui a fait couler beaucoup d’encre et dont l’épilogue a été très commenté : condamné dans un premier temps à 10 ans de prison pour avoir délibérément percuté des passants à un arrêt de bus avec sa Mercedes – suite à un argument avec le chauffeur du bus –, tuant une jeune femme, Kanpitak Pachimsawat, fils d’une ancienne Miss Thailand et d’un « père influent », a été innocenté en appel, en raison de ses « troubles psychologiques ».

Autre affaire qui avait choqué l’opinion publique, celle du Santika, cette discothèque où 67 personnes ont trouvé la mort dans un incendie le soir du Nouvel An 2009. L’enquête avait révélé que l’établissement n’était pas aux normes de sécurité imposées par la loi, que des issues de secours étaient condamnées et que l’édifice avait été construit avec des matériaux interdits et opérait illégalement grâce à la complicité de personnes bien placées, sans que la police ne puisse intervenir.

 

Seul le responsable du spectacle pyrotechnique à l’origine du feu vient de voir sa peine de prison ferme (trois ans) confirmée en appel. Le directeur du pub, condamné à la même peine, vient d’être acquitté.

 

Mais ce qu’on retiendra dans cette affaire, c’est que le « vrai » procès, celui qui aurait permis de dénoncer le système de corruption où sont impliquées des personnes influentes, dont un haut gradé de la police, actionnaire de la société propriétaire du Santika, et des fonctionnaires de la ville de Bangkok qui ont permis au Santika de passer outre la loi et d’opérer illégalement, n’a pas eu lieu.

 

Ces affaires, et tant d’autres, ne font que renforcer le sentiment d’impunité qui prévaut encore aujourd’hui lorsque des personnes influentes, ou leurs enfants, doivent répondre devant la justice. Philippe Plénacoste/Gavroche

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