
Figure centrale de la vie politique et militaire thaïlandaise depuis plus de deux décennies, le général Prawit Wongsuwan a annoncé son retrait de la vie politique, mettant fin à un parcours marqué par une influence durable sur les équilibres du pouvoir à Bangkok. Âgé de 80 ans, le chef du parti Palang Pracharath a justifié sa décision par des mots simples : « À 80 ans, cela suffit ».
Cette annonce a été faite le 26 décembre, à l’occasion de l’inauguration des bureaux de la fondation Roy Tor, où de nombreux sympathisants et proches étaient venus lui présenter leurs vœux pour la nouvelle année. Le choix du lieu et du moment n’est pas anodin : il souligne la volonté du général de quitter la scène politique sans mise en scène excessive, mais entouré de ses réseaux historiques.
Un retrait déjà amorcé
Ce départ s’inscrit dans une séquence entamée depuis plusieurs mois. Prawit Wongsuwan s’était déjà retiré de la course au poste de Premier ministre, une décision qui avait provoqué une érosion progressive des rangs du Palang Pracharath, plusieurs cadres et élus quittant le parti dans la foulée. Cette perte d’élan avait affaibli une formation autrefois centrale dans les coalitions gouvernementales issues de l’après-2014.
Un pilier du système politico-militaire
Né en 1945 à Bangkok et formé à l’Académie militaire royale de Chulachomklao, Prawit Wongsuwan a longtemps incarné la continuité entre l’armée et le pouvoir civil. Ancien commandant en chef des forces armées royales thaïlandaises, il a occupé des fonctions clés sous plusieurs gouvernements, notamment celles de vice-Premier ministre et de ministre de la Défense.
Proche de longue date de Prayut Chan-o-cha et d’Anupong Paochinda, avec lesquels il formait le trio surnommé les « trois P », Prawit est considéré par de nombreux observateurs comme l’un des architectes du coup d’État de 2014, même s’il a par la suite contesté publiquement cette lecture. Au sein de l’appareil de pouvoir issu de cette période, il jouait un rôle de stratège politique, veillant à la cohésion des majorités parlementaires et à la stabilité des coalitions.
Une influence politique controversée
Son parcours n’a pas été exempt de controverses. L’affaire des montres de luxe, révélée en 2017, avait durablement entaché son image, même s’il avait finalement été blanchi par la Commission nationale de lutte contre la corruption. Malgré ces polémiques, Prawit Wongsuwan est resté un acteur incontournable, capable de négocier avec des camps politiques opposés, y compris avec des figures historiquement proches de l’ancien Premier ministre Thaksin Shinawatra.
La fin d’une époque
Avec l’annonce de son retrait, c’est une page majeure de la politique thaïlandaise contemporaine qui se tourne. Prawit Wongsuwan laisse derrière lui un système qu’il a contribué à façonner, à la croisée des mondes militaire, politique et institutionnel. Son départ ouvre une période d’incertitude pour le Palang Pracharath, mais aussi pour l’équilibre des forces conservatrices dans un paysage politique thaïlandais en recomposition.
À 80 ans, le général choisit donc de se retirer, emportant avec lui une part de l’histoire récente du pouvoir en Thaïlande.
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