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THAÏLANDE – SANTÉ: Le pouvoir étrange des aiguilles

Journaliste : ANNE FEITZ
La source : Gavroche
Date de publication : 27/05/2020
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Parmi les techniques de guérison orientales, l’acupuncture est pour l’instant la mieux reconnue en Occident. Elle est pratiquée en France depuis les années 30, remboursée par la sécurité sociale depuis 1959, et désormais enseignée à l’université. En Thaïlande, elle est systématiquement enseignée aux médecins spécialises en rééducation, et c’est une part importante du cursus de 3 ans affirme le Dr Rattana Rattanatharn, médecin.

 

Selon la médecine chinoise, l’énergie vitale d’une personne, le Qi, circule le long de douze lignes de force principales, appelées méridiens, qui parcourent tout le corps en reliant les organes entre eux. Sur ces méridiens sont situés des points d’acupuncture, au nombre de 1500 environ. En stimulant ces points, le praticien peut éliminer les blocages, rétablir les flux d’énergie et les équilibres fondamentaux de l’organisme, dont le désordre à cause la maladie. Par exemple, stimuler un point situé sur le second orteil permet de soulager des maux de tête ou de dents.

 

Le diagnostic est une part très importante de la séance. « II faut discuter avec le patient, lui prendre le pouls, sentir son odeur, observer la couleur de sa langue et de son visage, écouter sa voix, sa façon de parler… En fonction de tous ces éléments, l’acupuncteur peut déterminer ou sont les déséquilibres personnels, et décider du traitement approprié », explique Dan Ouyang, qui a étudié l’acupuncture en Chine pendant quatre ans. Le praticien procède ensuite à la pose des aiguilles. Selon les cas, il peut compléter par de la «ornoxibustion», qui consiste à faire brûler des plantes, comme de l’absinthe, dans des coupelles au sommet des aiguilles. «La chaleur augmente la stimulation», précise Dan Ouyang. II peut aussi accélérer cette stimulation par l’électricité, ou encore en tournant les aiguilles manuellement. Cette dernière manipulation, rarement pratiquée en Europe, peut s’avérer douloureuse. Les aiguilles sont laissées environ une demi-heure.

 

Le plus souvent, un traitement nécessite plusieurs séances, dont le prix varie entre 500 et 1500 bahts, selon les praticiens, et parfois davantage. « J’ai payé 3000 bahts pour une séance destinée à soigner des allergies », témoigne Nathalie. Les résultats sont mitigés. Certains témoignages sont franchement négatifs. « J’ai essayé un jour de soigner une migraine : non seulement l’acupuncture ne m’a pas soulagée, mais ma crise s’est aggravée », raconte Marie. Le plus souvent toutefois, l’acupuncture est efficace. « J’avais des angines presque tous les mois, que je soignais avec des antibiotiques », affirme Valérie. « Je suis allée voir une acupunctrice quelques mois après mon arrivée Bangkok il y a deux ans : dès la première séance, alors que ma gorge était très rouge, j’ai senti la douleur disparaître. J’avais aussi une crise de sinusite : mon nez s’est miraculeusement débouché. J’ai encore fait trois séances, à une semaine d’intervalle. Depuis, je n’ai plus eu une seule angine !» «L’acupuncture marche extraordinairement bien pour les inflammations musculaires, les tendinites, etc », témoigne de même Banchong Chudatemiya, acupuncteur à Bangkok. « J’ai vu des patients arriver sans pouvoir poser le pied, et ressortir sans boiter ! »

 

Suite à l’engouement occidental pour l’acupuncture, des associations de médecins ou des organisations gouvernementales ont mené des milliers d’essais cliniques pour tenter de prouver son efficacité. Mais ces essais ont fait l’objet de nombreuses critiques méthodologiques. Malgré tout, l’Organisation Mondiale de la Santé a publie une liste de 43 maladies, sur lesquelles elles reconnait que les aiguilles ont une certaine efficacité.

 

Imposer les mains pour soigner

 

C’est la grande mode en ce moment parmi les femmes expatriées à Bangkok : nombre d’entre elles veulent s’initier au Reiki, une technique de guérison par imposition des mains…

 

A la base du Reiki, une théorie selon laquelle l’univers est régi par une énergie universelle, (le Reiki), qui circule autour de nous dans un champ appelé l’aura, et dans notre corps à travers les chakras, les méridiens et les nadis. En posant ses mains sur le corps du patient, selon des positions très précises, le praticien invoque cette énergie, la canalise et la fait circuler dans l’organisme, jusqu’à obtenir la guérison. L’origine du Reiki n’est pas clairement déterminée, on le dit tibétain, bouddhiste ou shamanique… II a été redécouvert à la fin du XIXe siècle par un Japonais, le Dr Usui.

 

II y a plusieurs niveaux d’initiation explique Thérèse Levanngoc, maître de Reiki. Le niveau 1 est l’apprentissage de la technique, des différentes positions des mains. Dans le niveau 2, le maître vous donne les symboles secrets, au nombre de trois : il s’agit d’idéogrammes à invoquer mentalement lors du traitement, qui augmentent le pouvoir de guérison et permettent même de soigner à distance. Enfin le dernier niveau permet d’accéder au quatrième symbole et au statut de Maitre, qui autorise à enseigner à son tour. Le coté mystique du Reiki provoque souvent le scepticisme. En Europe, il est même parfois assimilé à une secte. Pourtant, il ne relève pas d’une croyance ni d’un dogme particuliers, même si ses partisans croient à son origine divine. « Le Reiki est de nature spirituelle, mais il n’est pas une religion. II marche, qu’on y croie ou pas, explique Pierre Wittman, maître de Reiki Chiang Mai.

 

En fait, l’appréhension du Reiki dépend beaucoup du maître qui pratique l’initiation. Certains peuvent développer des théories, imposer un mode de pensée assimilable à un embrigadement. Certains peuvent aussi faire payer très cher. Madame Takata, la Japonaise ayant introduit le Reiki aux États-Unis au début du siècle, imposait des règles très strictes pour sa pratique et demandait 10 000 dollars pour le 3eme niveau ! A Bangkok, Thérèse Levannogoc par exemple demande 3 000 bahts pour l’initiation aux niveaux 1 et 2, et 10 000 bahts pour devenir maître. II est aussi possible de se faire simplement soigner : une consultation revient à 500 bahts.

 

Le Reiki est-il vraiment efficace ? Certains témoignages sont troublants. Des amies, dont je ne mets pas en doute l’esprit rationnel, racontent avoir ressenti des «flash de lumière», « des sensations de chaleur ou de glace » en recevant le Reiki. L’une soigne ses maux de gorge, l’autre ses insomnies, la troisième les entorses de son mari, grâce au Reiki. Thérèse Levannogoc raconte de même de nombreuses guérisons, parmi lesquelles celle de son propre ulcère : pendant 20 ans, elle a tenté de se soigner avec des médicaments. Elle en prenait tellement qu’elle a eu des problèmes de foie, de reins, et a même perdu ses cheveux. Depuis qu’elle a essayé le Reiki il y a 10 ans, son ulcère a disparu et n’est jamais revenu… « Tous mes patients veulent s’initier !», affirme-t’elle. Ce qui est sure en tous cas, c’est que le Reiki ne peut pas faire de mal…

 

La guérison au bout des doigts

 

« Thai massage ? Foot massage ? » Sur les plages de Thaïlande ou dans les ruelles de Bangkok, impossible d’échapper au massage traditionnel thaïlandais, réputé dans le monde entier. Pourtant, il n’est encore que rarement pratique a des fins thérapeutiques. « Le massage thérapeutique n’a été légalisé qu’il y a deux ans en Thaïlande», rappelle Preeda Tangtrongchitr, manager de l’école de médecine traditionnelle du Wat Po.

 

II repose sur la même théorie que l’acupuncture : en stimulant certains points, le masseur rétablit les flux d’énergie et les équilibres fondamentaux de l’organisme. II peut pour cela utiliser diverses techniques, l’acupressure ou le shiatsu (similaires à l’acupuncture sans aiguilles), ou le massage ayurvédique, a base d’huile de sésame. De la même façon, la réflexologie considère que les différentes parties de la plante des pieds (ainsi que de la paume des mains) correspondent aux différents organes du corps humain. En les stimulant selon des techniques particulières, il est possible de soigner certains maux. « On peut travailler ainsi des zones très précises, selon le problème du patient : s’il a de l’asthme, on massera la zone des poumons et de la poitrine par exemple», explique ainsi une réflexologue.

 

Attention cependant : ce n’est pas parce qu’un salon de massage affiche, comme c’est le cas partout à Bangkok, le fameux schéma des zones réflexes du pied que ses masseurs vous soigneront ! Loin de là. Le plus souvent, ces massages n’ont qu’un effet relaxant, de bien-être. En Thaïlande, la plupart des masseurs ont appris sur le tas, ou, au mieux, en suivant l’une des formations dispensées à Bangkok. Celle du Wat Po comporte pour l’instant 30 heures de cours pour le massage traditionnel, plus 30 autres heures pour le massage thérapeutique (7000 bahts chacune), et 15 heures pour la réflexologie (3700 bahts). « On n’y apprend que la technique, sans aucune théorie sur l’anatomie », témoigne Nadia, qui vient de suivre l’une de ces formations.

 

Certains centres ou des particuliers proposent néanmoins de véritables massages thérapeutiques. L’Institut de médecine traditionnelle thaïe et la clinique du Wat Po (qui compte 130 médecins traditionnels) en dispensent aussi. Même dans les salons de massages du Wat Po destinés aux touristes, il y a désormais en permanence cinq médecins…

 

ANNE FEITZ

 

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