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THAÏLANDE – CORONAVIRUS: Pourquoi les inégalités sociales sont aggravées par l’épidémie

Journaliste : Redaction
La source : Gavroche
Date de publication : 06/05/2020
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Les auteurs du rapport récent de la Banque Mondiale sur les inégalités en Thaïlande ont pris la plume à la fin avril pour détailler l’impact de l’épidémie de coronavirus-Covid 19 sur le royaume. Une analyse riche en exemples et en faits. Avec une question en arrière plan: comment la Thaïlande peut-elle limiter l’impact de la pandémie sur son économie en élargissant les filets de sécurité pour les personnes vulnérables et en repensant la protection sociale ?

 

A coup sur, l’épidémie de COVID-19 aggravera une situation déjà difficile pour les ménages thaïlandais confrontés à la sécheresse, à la stagnation de la croissance des salaires et à l’augmentation de la pauvreté. Les taux de pauvreté avaient déjà augmenté en 2016 et 2018, selon le rapport de la Banque Mondiale intitulé Taking the Pulse of Poverty and Inequality in Thailand. Aujourd’hui, avec le déclin de l’activité économique, la perte d’emplois et de revenus va probablement aggraver le bien-être des ménages.

 

Besoins de base

 

La baisse des revenus constitue un sérieux défi pour la réduction de la pauvreté. Les revenus du marché du travail représentent une part importante des revenus des ménages, et leur baisse réduira leur capacité à payer les factures et à satisfaire les besoins de base. Les revenus provenant des transferts de fonds sont également importants – plus que les revenus de l’aide publique – mais comme les migrants ne peuvent pas travailler, cette source de fonds devrait également diminuer. Avec une faible épargne, les ménages ont peu de marge de manœuvre pour lisser la consommation afin de faire face au choc des revenus.

 

Plus de la moitié des travailleurs dans le secteur informel

 

Plus de la moitié des travailleurs en Thaïlande sont dans le secteur informel, ce qui signifie qu’ils ne sont pas couverts par un régime de sécurité sociale et sont particulièrement vulnérables. En 2018, on estimait à 21,2 millions le nombre de travailleurs du secteur informel et à 17,1 millions celui des travailleurs du secteur formel. Outre l’agriculture, avec un taux d’informalité de 92 %, les emplois dans le commerce présentent le deuxième taux d’informalité le plus élevé, soit 60 %.

 

Le système de protection sociale thaïlandais est confronté à plusieurs défis face à ces nouveaux besoins. Les dépenses en matière de protection sociale sont à la traîne par rapport à d’autres pays : en 2015, la Thaïlande y a consacré, selon les estimations, 3,7 % de son PIB, contre 6,3 % au Vietnam et en Chine et 10,1 % en Corée à revenu élevé. Contrairement à la Chine, à la Malaisie, au Mexique et à d’autres pays à revenu intermédiaire supérieur, la Thaïlande ne dispose pas d’un programme généralisé de filet de sécurité pour les pauvres, bien que le système de carte d’assistance sociale existant constitue un pas dans cette direction.

 

Mesures fiscales et monétaires

 

Le gouvernement a pris des mesures importantes pour faire face aux défis économiques auxquels sont confrontés les ménages. Il a introduit une série de mesures fiscales et monétaires à partir de janvier, la plus récente ayant été annoncée début avril. Les mesures politiques annoncées représentent au total environ 15 % du PIB, soit l’un des plus élevés de l’Asie de l’Est et du Pacifique. Ces mesures comprennent des prêts à taux réduit et un assouplissement du remboursement des prêts, une réduction des cotisations de sécurité sociale et des déductions fiscales pour les PME liées au maintien de l’emploi. La mesure la plus significative est un transfert d’argent liquide de 5 000 bahts/mois pendant six mois pour les travailleurs informels non couverts par le Fonds de sécurité sociale.

 

Même si la propagation de l’épidémie en Thaïlande est contenue, l’économie sera affectée par une récession mondiale et un affaiblissement de la croissance intérieure. Les principales préoccupations sont les suivantes : (i) des arrivées de touristes beaucoup plus faibles et, par conséquent, une activité plus faible dans les secteurs du commerce de détail et de l’hébergement ; (ii) une consommation intérieure plus faible, reflétant un sentiment de consommation déprimé et des pertes de salaires et d’emplois alors que les entreprises font face à la crise ; et (iii) un ralentissement de la production dans les principales chaînes d’approvisionnement, telles que l’électronique et l’automobile, qui sont essentielles aux exportations thaïlandaises.

 

Projections économiques

 

En conséquence, la Banque Mondiale a révisé les projections de croissance de la Thaïlande pour 2020, les ramenant de 2,9 % (en octobre 2019) à une fourchette de -3,0 % à -5,0 %, reflétant une forte contraction de l’économie. Bien que la douleur économique semble inévitable, des actions politiques rapides pour sauver des vies et préserver des emplois – en particulier pour les pauvres et les personnes vulnérables – peuvent amortir certains des impacts.

 

Le gouvernement peut veiller à ce que les groupes particulièrement vulnérables, notamment les migrants, les personnes âgées et les femmes enceintes, soient protégés. D’autres moyens d’améliorer l’aide sociale peuvent consister à fournir des subventions à l’emploi et à s’appuyer sur les mesures initiales pour rendre le système d’assurance chômage plus généreux. À mesure que l’économie sort de la marginalisation sociale, le gouvernement peut envisager de renforcer ses mesures de reconversion et de perfectionnement des travailleurs au chômage.

 

Protection sociale

 

À moyen terme, une action clé que la Thaïlande peut envisager est la mise en place d’un système de protection sociale adapté.

 

La priorité la plus immédiate est d’assurer un ensemble minimum de prestations pour les plus vulnérables ; il faudra des ressources importantes pour que le gouvernement puisse compléter les efforts des ménages et des individus. Cela peut nécessiter une augmentation des allocations budgétaires pour la protection sociale au-delà de la réponse immédiate à la COVID-19, afin de porter ces dépenses au niveau des pays pairs.

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