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THAILANDE – CULTURE: Un piano enchanteur à Bangkok

Journaliste : Redaction
La source : Gavroche
Date de publication : 24/01/2019
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Il était sur scène lors de l’inauguration de la nouvelle Alliance Française, devant un public médusé. Il jouait ce soir-là des mélodies d’Aznavour. Le pianiste Philippe Guilhon-Herbert répond à Gavroche.

 

Gavroche :  Pourquoi Bangkok ?

 

Philippe Guilhon-Herbert : L’Asie, dès l’enfance, m’a toujours attiré. Que ce soit très jeune à travers les arts martiaux, l’Aïkido et le Tae Kwon Do que j’ai pratiqués, bien sûr le kungfu et Bruce Lee, comme tout jeune adolescent, mais aussi à travers un attrait particulier pour le Japon à travers la musique du grand compositeur Toru Takemitsu.

 

L’impression de raffinement et de délicatesse fortement véhiculée par le bouddhisme, spiritualité et philosophie de vie à laquelle je suis sensible, y est sûrement aussi pour quelque chose.

 

Après avoir vécu toute ma vie à Paris, en avoir goûté voire épuisé les délices et les désagréments, tout particulièrement le climat, le paradis tropical terrestre me semblait être l’Asie du Sud-Est.

 

Végétation, climat, mais aussi plages et monde marin extraordinaires…

 

Pour moi, en tant que musicien, c’était Bangkok qui me semblait la ville la plus adaptée à mes activités professionnelles.

 

Bien que tentaculaire, ses habitants sont d’une douceur incomparable, ils viennent de toutes les communautés en Thaïlande mais aussi de Birmanie, et colportent avec eux cet extraordinaire élégance, cette beauté, cette noblesse et dignité que j’associe encore une fois au bouddhisme.

 

Je ne rencontre pas ici la violence des grandes villes occidentales.

 

L’élégance morale des thaïlandais me permet de vivre dans la douceur, le calme et la paix.

 

Q : Quel fut votre parcours avant Bangkok ?

 

R : J’ai commencé le piano à six ans.

 

Pendant quatre ans j’ai étudié au conservatoire municipal du XVIIème à Paris, dans l’arrondissement où j’habitais.

 

À 12 ans je rentre pendant deux ans au conservatoire supérieur, et me dirige vers une formation musicale intense.

 

Au point que je suis des cours par correspondance jusqu’au bac…

 

Nous sommes dans les années 80, je me passionne pour les synthétiseurs tout en continuant la musique classique.

 

À 15 ans, pour des raisons familiales, j’arrête le piano et me concentre sur la musique improvisée et la composition.

 

Les musiques de films me fascinent aussi : Eric Serra ( Le grand bleu), Vangélis, et d’autres.

 

Après le bac, à 18 ans, je reprends le piano et vais étudier à Fribourg en Allemagne.

 

Vont commencer ensuite des séries de dizaines de concerts, beaucoup en Allemagne, mais aussi dans les grandes capitales européennes et à New York.

 

Ponctuellement et en parallèle, entre autres pour l’Opéra de Paris, je suis accompagnateur.

 

Ce qui me permet de parfaire ma connaissance de tout le répertoire d’opéra, mais aussi celui de l’orchestre et de tous les instruments.

 

Je me forme même alors à la direction d’orchestre.

 

J’y travaille aussi les Lieds et mélodies, c’est-à-dire les poèmes mis en musique, Verlaine, Apollinaire, Debussy…

 

Je deviens ensuite professeur au conservatoire du VIème à Paris.

 

Un cadre confortable mais une routine ennuyeuse.

 

À 40 ans, je pars à la découverte de l’Asie.

 

Je prends une année de disponibilité qui se prolonge depuis à l’infini.

 

Tout au long de ces dix années j’ai eu la chance d’enregistrer un disque par an et surtout d’avoir pu choisir ce que je voulais interpréter.

 

De grandes œuvres classiques comme Les sonates tardives de Schubert à des œuvres plus confidentielles comme celle de Reynaldo Hahn, l’ami et amant de Proust, en passant par Tchaikovsky, Stravinvinsky, Chopin ou Poulenc, répertoire éclectique et fascinant.

 

Q : Professionnellement, la Thaïlande vous convient ?

 

R : Aujourd’hui, à Bangkok, je suis consultant pour l’institut de la princesse Galyani mais surtout pour le magasin Peterson, le plus grand magasin de musique de Thaïlande avec environ 80 pianos à queue de grandes marques et une académie de musique classique.

 

Je m’y exerce très intensivement quatre heures par jour, nécessité intellectuelle et artistique.

 

Par ailleurs les pianos doivent être joués, sinon ils s’empoussièrent, il faut leur donner un lustre.

 

Je conseille aussi à la vente.

 

Je suis en quelque sorte leur « pilote d’essai ».

 

Q : Votre dernier disque est dédié à Chopin, vous allez faire un récital de musiques romantiques à l’Alliance Française pour la Saint-Valentin. Pourquoi ce choix de répertoire ?

 

R : La musique romantique, est par excellence la quintessence de l’interprétation et de la théâtralisation des sentiments.

 

Elle explore les méandres du drame humain, elle est noble, troublante, passionnée et confère une sensation de grande puissance.

 

Alors que Chopin remarquait que Bach explorait l’univers à travers sa musique, que Beethoven était lui aussi à la recherche d’autres planètes, lui n’explorait, disait-il, que « le cœur humain ».

 

Bien qu’adolescent je fus davantage attiré par Liszt, compositeur plus spectaculaire, je peux affirmer aujourd’hui que Chopin représente l’esprit du piano romantique, véritable figure sacrée.

 

Il transporte l’interprète dans un état de grâce complet, teinté de la grâce de Mozart associée à la puissance de Liszt et emprunt du génie romantique de Tchaïkovski.

 

Pianiste par excellence, Chopin a su extraire de sa vie dramatique la quintessence du romanesque et la conscience de la puissance du drame.

 

Sa musique est la traduction ultime des sentiments et des passions humaines.

 

Propos recueillis par Christelle Célerier

 

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