Home Accueil THAÏLANDE – DISPARITION: Vincent Sukasem (1952-2020), poète, témoin et passeur de culture entre l’Europe et l’Asie

THAÏLANDE – DISPARITION: Vincent Sukasem (1952-2020), poète, témoin et passeur de culture entre l’Europe et l’Asie

Journaliste : Jean-Michel Ferry
La source : Gavroche
Date de publication : 24/10/2020
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Gavroche pleure avec ses proches et ses amis la disparition de Vincent Sukasem. Écrivain et enseignant, Vincent Sukasem – «Tuu» – était né en 1952 dans le Nord-Est de la Thaïlande. Il s’est éteint le 18 Juillet 2020 à Tahiti et ses amis nous ont transmis ces jours ci ce bel hommage… Entre ces deux régions de prédilection un parcours atypique étonnant.

 

Vincent Sukasem avait passé son enfance à Bangkok mais aussi dans sa famille à Ubon Ratchatani et à Erawan dans la province de Loei, qu’il affectionne particulièrement. Il quitte la Thaïlande après les révoltes étudiantes de 1973 pour gagner Paris où il devient enseignant d’anglais et sera naturalisé français. Il enseigne dans les lycées de la république dans les DOM-TOM et en particulier à Tahiti.

 

Vincent, musicien, poète et interprète (album en 1992) devint aussi écrivain, passionné par sa région natale, la beauté infinie des paysages de l’Issan, l’histoire de son peuple, la richesse de sa culture, mais aussi sensible à son asservissement. Son premier roman « Là-bas flottent les pollens de riz noir » (2015-traduit en Thaï par l’auteur) déroule la chronique terrible d’une famille éclatée, d’une mère délaissée élevant seule ses enfants, où les traditions, la culture, les superstitions sont bien présentes. « Les hommes croient que les esprits continuent à exister et errer, invisibles ou non, selon leur Karma… C’est pour cette raison que les êtres humains entretiennent des relations complexes avec les esprits, de peur et de respect… Ne pas les déranger, leur faire régulièrement des offrandes, des fleurs, de l’eau et de la nourriture… ». « Roman captivant où les sentiments des protagonistes s’exacerbent et s’entrechoquent, roman émouvant qui reflète la face mystérieuse, pudique, forte mais délicatement cachée de l’âme asiatique ». (Jean Pierre Ghio)

 

Nature de la révolte

 

Un second ouvrage historique « Nature de la révolte de 1901-1902 dans le Nord-Est de la Thaïlande » (2016), décrit successivement l’assimilation forcée des peuples de l’Issan, par la brutale occupation française de la rive droite du Mékong puis l’écrasement des révoltes paysannes sur la rive gauche et l’uniformisation massive par le biais de la langue Thaï.

 

Un troisième livre en anglais « The English Governess at the Siamese court » trie le vrai du faux dans l’histoire de Mrs Anna Leonowens à la cour de Rama IV. (2017)

 

Meurtre à Manihi

 

Enfin, un dernier roman « Meurtre à Manihi » (2018), se déroule sur un atoll de la Polynésie française. Une plongée dans les mœurs et coutumes des îles.

 

Saluons ainsi le parcours improbable de ce franco-thaï conservant ses racines profondes en cette diagonale du Nord-Est qui va d’Ubon à Loei, devenu professeur en France, enseignant l’Anglais en Polynésie, partageant la fin de sa vie entre Tahiti et sa maison typique de Bangkok, s’exprimant, volubile et humaniste, aussi bien en Lao, en Thaï, en Français qu’en Anglais… La dernière phrase qu’il m’a écrite « Si la montagne de Loei veut que je revienne, alors on se reverra ». Nul doute que l’esprit de Vincent demeure pour toujours… Là-bas.

 

Remerciements à Michel Testard

 

Jean-Michel Ferry
Bangsaen Le 23 10 2020

 

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