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Thaïlande : le « CHOC » culturel

Journaliste : David Hegron & Malto C.
La source : Gavroche
Date de publication : 26/06/2013
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Alors qu’en France, la mode est au choc fiscal, au choc budgétaire ou au choc Cahuzac, en Thaïlande, le « choc » culturel est pour tous une réalité quotidienne qui suscite bien souvent l’étonnement, mais qui génère aussi son lot d’incompréhension ou d’agacement, allant parfois jusqu’au rejet… Gavroche a recensé les faits quotidiens les plus marquants qui font de la Thaïlande un pays si singulier, mais pas toujours adapté à nos bonnes vieilles  habitudes d’Occidentaux… Alors, choqué ?

La perte de face

 

De manière générale en Asie, et en Thaïlande en l’occurrence, la perte de face est un élément fondamental de la culture. Et la faire perdre peut avoir des effets parfois désastreux…

 

Prenons l’exemple de ce patron européen, qui arrive au bureau un matin mal luné. Il passe ses nerfs sur sa secrétaire en pleine réunion de travail parce que cela fait deux fois – « oui, deux fois ! » – qu’elle oublie de mettre du sucre dans son café. Elle lui répond par un sourire gêné et se confond en excuses. Le lendemain, il apprend que sa secrétaire a démissionné, mais aussi son ingénieur informaticien et son comptable… C’est ce qu’on appelle le « syndrome de la tasse à café ». La secrétaire était la petite amie de l’ingénieur et le comptable son beau-frère !

 

Prenons un autre exemple. Un gars déboule d’un petit soï sans regarder et vous oblige à piler net. Revenu à sa hauteur, votre nature prend le dessus et vous invectivez de tous les gentils mots français-anglais- thaïs réunis qui vous passent par la tête cette espèce d’abruti dans sa Benz qui a failli vous envoyer à trépas et lui décrochez un geste universel sous le regard éberlué de sa poupée fardée assise à ses côtés. Puis vous repartez, avec votre nouvel ami, furibard, à vos trousses…

 

Si les insultes portées à un Thaïlandais peuvent finir en fait divers, surtout si elles ont été prodiguées en public, faire perdre la face n’est généralement pas si dangereux mais risque de vous jouer quelques mauvais tours. La « zenitude » a ses limites, même en Thaïlande où l’on a érigé le sourire et la patience en symboles nationaux. Alors pour passer vos nerfs, n’insultez qu’en français ou tout autre langage inconnu de votre interlocuteur, et avec le sourire !

 

L’ordre et… le désordre

 

Les Thaïlandais savent s’imposer une discipline, tout en contournant les règles dans un joyeux désordre. Avez-vous remarqué ces gens qui s’arrêtent de courir dans les parcs pendant l’hymne royal ? Les spectateurs qui se lèvent dans les salles de cinéma avant chaque projection ? Les files d’attente sagement organisées dans les transports pour ne pas griller la politesse ? Cela peut parfois surprendre, mais renforce surtout le sentiment d’un peuple discipliné et pétri de respect.

 

Dans d’autres cas, c’est le grand folklore ! Un joyeux souk pour nous Européens. Le port du casque par exemple est-il obligatoire ? Oui, la loi existe mais on la contourne, on le met surtout la journée lorsque la police sévit. Le soir venu, dans les campagnes ou en ville, le casque reste à la maison. Quant aux piétons, ils sont soumis à la loi du plus fort ou, pourrait-on dire, la loi du plus riche. Ainsi, dans la hiérarchie du respect des autres, le piéton arrive entre les chiens errants et les charrettes ambulantes, suivis des motos, des pick-up, des voitures, des grosses voitures, des voitures de luxe, des minibus…, les rois de la route étant incontestablement les bus. Autant dire que si vous êtes à pied, ne pensez jamais qu’une moto ou une voiture vous laissera traverser au passage piéton avant elle ! La discipline est un comportement très naturel chez les Thaïlandais, mais pas le sens civique…

 

Le bruit

 

Attention oreilles sensibles, si la Thaïlande est le pays du sourire, c’est aussi celui du bruit ! A Bangkok, pour ne prendre que l’exemple de la Cité des Anges qui ont raté la porte du Paradis, le calme et le silence sont des notions toutes relatives… voire inexistantes ! Si échapper au vacarme d’un immeuble en construction ou au grondement assourdissant de la circulation tient déjà de l’exploit, les bars, discothèques, restaurants, karaokés, écrans géants, écrans plasma, podiums, hauts-parleurs disséminés à chaque coin de rue, dans chaque bus, station de métro, rame de métro, centre commercial, esplanade, etc, vous rappelleront qu’ici, la culture des sonos crachant leurs décibels dans une cacophonie inaudible à vous arracher les tympans est un culte ! Ce ne sont pas les gardiens de parking nés avec un sifflet dans la bouche, ni les marchands de glace et leur musique à vous donner envie de leur faire avaler leurs cornets ou les inventeurs des portes automatiques des 7/Eleven ou des pots d’échappement pour tuk-tuk qui vous diront le contraire ! Autant avoir les oreilles bien accrochées ou se munir d’un bon stock de boules Quies, introuvables en Thaïlande…

 

La notion d’environnement

 

Si vous avez été baigné dès votre tendre enfance par les valeurs écologiques, elles ne sont pas toujours partagées par les Thaïlandais, la faute à un « retard d’allumage » dans les pays en fort développement où la notion de contribution éco-citoyenne n’est pas encore enseignée à l’école, ni au gouvernement… Difficile alors de faire prendre conscience aux gens des petits gestes salutaires pour la planète. L’exemple le plus symptomatique est certainement celui du sac plastique. On en consomme des quantités invraisemblables. Prenez par exemple les supermarchés. Non seulement les sacs sont disponibles et gratuits, mais l’aimable caissière les rangera par catégorie d’aliments. Un sac pour les produits laitiers (même si vous n’avez qu’un paquet de yaourts), un autre pour les légumes, un autre pour les fruits et un autre encore pour les produits ménagers, et puis deux pour les bouteilles (au cas où l’un se déchirerait). Bref, vous aurez de quoi remplir vos placards pour les mois à venir, et les utiliser comme sacs poubelle qui finiront, eux, dans les décharges. Quant à refuser un sac plastique, c’est avoir droit au sourire éberlué de la caissière qui doit se demander dans quelle planète vous vivez…

 

Les goûts et les couleurs

 

Le kitsch a beaucoup de succès en Thaïlande. N’avez-vous jamais grimacé en découvrant l’intérieur d’un appartement à louer ou celui de votre voisin thaïlandais directeur de banque ? Chaises et tables en bois rouge ultra laqués, table basse en tronc d’arbre, fauteuils Louis XVI, horloge Grand-Père, rideaux roses « bonbonnière », housses plastifiées pour les chaises… ça détonne ! Dans la rue aussi, les couleurs criardes et déco rétro-psyché sont de mise. Les taxis DJ, les voitures spécial tuning, les bus VIP avec rideaux de douche col Claudine et sièges multicolores, les cars scolaires façon mangas japonais, Al Pacino (ou Robert de Niro) sur les bavettes des semi-remorques… on a le droit d’être surpris ! Cette tendance tire probablement ses origines de Chine ou le clinquant-pimpant est un art de paraître plutôt qu’une faute de goût… Allez savoir.

 

Same same but different ?

 

Les Thaïlandais vendent les mêmes produits aux mêmes endroits. Exit la notion de concurrence et de territorialité, ici on se regroupe pour vendre, pour le meilleur et pour le pire. Partout en Thaïlande, vous croiserez sur le bord des routes des cultivateurs et artisans qui proposent fruits, légumes et autres produits régionaux. Ce qui peut surprendre, ce n’est pas qu’ils vendent tous les mêmes produits, aux mêmes prix, mais qu’ils soient collés les uns aux autres. On produit la même chose, on vend la même chose, mais chacun de son côté. Une concurrence équitable en quelque sorte qui tient plus de la vente du muguet que du regroupement coopératif… Car en Thaïlande, où la notion de pragmatisme est très développée, « on vend ce que tout le monde vend parce que tout le monde achète ce que tout le monde vend » ! Les mêmes t-shirts, les mêmes souvenirs, les mêmes gadgets… Une uniformisation bien plus ancienne qu’on ne le croit (les crapauds en bois s’arrachent sur les étals de Patpong depuis l’arrivée des premiers touristes dans le royaume…) et qui explique sûrement pourquoi les 7-11 sont aujourd’hui à la Thaïlande ce que les boulangeries sont à la France : un patrimoine !

 

Les sherifs…

 

Mais où est la police ? Si les Français râlent sur les flics « qui ne sont jamais là quand on a besoin d’eux mais toujours là pour vous aligner », en Thaïlande, c’est plutôt : « Ils sont toujours là même quand on a pas besoin d’eux ! » Question de perspective… et d’effectifs ! Avec leur uniforme moulant, leur bol de riz sur la tête, les (fausses) Ray-ban sur le nez et leur gros pétard à la ceinture, ces

 

« shérifs » thaïlandais font partie du décor (à défaut du folklore). On s’amuse ou on s’agace devant ce service d’ordre omniprésent, parfois laxiste, parfois tatillon, parfois endormi (surtout sur les feux rouges) mais souvent reconnaissant. Ainsi, notre shérif vous gratifiera d‘un rire bien rauque si vous avez la gentillesse de contribuer par un (ou deux ?) biffetons au repas arrosé de fin de semaine qu’il organise avec ses collègues ici présents. Promis, il n’a pas vu que vous veniez de griller le feu et pris un U-turn en sens inverse. Et si vous devinez par son accent qu’il est originaire d’un village près de Buriram, là il vous invitera à partager un verre de whisky soda avec lui, après le service bien sûr.

 

Mais ne jouez pas avec le feu tout de même, car la police thaïlandaise a la réputation d’avoir la gâchette facile.…

 

Les hôpitaux 5 étoiles

 

« hub » en matière de soins hospitaliers, attirant chaque année des dizaines de milliers de touristes-malades du monde entier. Des hôpitaux, privés certes, proposent un service à faire pâlir de douleur toute personne qui a déjà expérimenté un séjour aux urgences dans un hôpital français. Hôtesses d’accueil, prise en charge immédiate, chambre individuelle ou suite royale avec chambre d’amis et cuisine aménagée pour les plus fortunés (ou les mieux assurés), armée d’infirmières et aides-soignantes aux petits soins, frigo, télé câblée, trousse de toilette et l’incontournable canapé-lit pour la famille ou les amis – un Thaïlandais dort rarement seul dans un hôpital, véritable « nid à fantômes » – font partie de la panoplie du parfait malade. Et si vous ne voulez pas de la nourriture servie « à la carte » par l’un des restaurants de l’hôpital, vous pourrez toujours vous rabattre sur un Mc Do ou une bonne pizza qui vous seront livrés dans votre chambre. Certes, à 200 euros la nuit, il vous faudra être bien assuré. A défaut, le régime « dortoir et riz à l‘eau » dans un hôpital public vous rappellera de bons souvenirs…

 

Les fantômes

 

Plus de 99% des Thaïlandais croient aux fantômes (pii). Et ces mêmes 99% raffolent… de films de fantômes ! C’est ce qu’on appelle soigner la peur par la peur. Impossible d’y échapper. Tout Thaïlandais qui se respecte a déjà croisé au moins une fois le chemin d’un fantôme, en vrai ! Si cette croyance trouve ses racines dans les profondeurs insondables du culte des esprits, très présent chez les bouddhistes, la matérialisation des fantômes se fait surtout à travers les feuilletons télé et les films d’épouvante qui fascinent tant les Thaïlandais… au point de se demander parfois où s’arrêtent les frontières entre la réalité et la fiction. Une émission réalité consacrée à la chasse aux pii est même l’une des plus regardées du royaume. Alors, avant de rentrer dans votre nouvelle maison ou d’intégrer vos bureaux, faites en sorte de vous faire accepter par les fantômes des lieux en déposant à boire et à manger sur l’autel qui leur est dédié. Cela devrait les calmer… pour un temps.

 

David Hegron & Malto C.

 

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