Home Accueil THAÏLANDE – POLITIQUE : Prayut Chan-Ocha reste premier ministre, l’heure des leçons

THAÏLANDE – POLITIQUE : Prayut Chan-Ocha reste premier ministre, l’heure des leçons

Journaliste : Philippe Bergues Date de publication : 01/10/2022
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Premier ministre Prayut

 

Prayut ne perd pas la face mais la Cour constitutionnelle a rendu une décision mi-figue mi-raisin qui mécontente l’opposition. Analyse de notre collaborateur Philippe Bergues.

 

Qui donc était le Premier ministre thaïlandais entre le 24 août 2014 et le 6 avril 2017 ? Les décisions de la Cour constitutionnelle thaïlandaise peuvent parfois étonner par leur irrationalité. Par 6 voix contre 3, les juges constitutionnels ont statué que Prayut Chan-ocha peut continuer à être Premier ministre malgré le dépassement de la limite de 8 ans spécifiée dans la constitution. La décision est mi-figue mi-raisin parce qu’elle va rallumer le mouvement de protestation mais ne donne probablement que quelques mois de plus à Prayut en tant que chef du gouvernement. Celui-ci devra prendre sa retraite en 2025, à mi-chemin de la prochaine législature. Donc il semble très peu probable qu’il soit nommé comme candidat potentiel au poste de chef de gouvernement lors des élections législatives prévues en mars 2023. Si le calendrier est respecté. Mais ce verdict du vendredi 30 septembre 2022 lui permet de sauver la face car il pourra accueillir en grande pompe les leaders mondiaux lors du sommet de l’APEC à Bangkok du 14 au 19 novembre prochain. Sous les flashs des médias internationaux, Prayut sera le visage de la Thaïlande face à Xi Jinping ou Kamala Harris (Joe Biden a déjà annoncé qu’il ne sera pas présent), au Queen Sirikit National Convention Center et cela constituera son heure de gloire.

 

Des réactions hostiles des mouvements pro-démocratie et des partis d’opposition

 

Dès l’annonce du verdict, des rassemblements ont été appelé par le groupe pro-démocratie Ratsadon au Victory Monument et par les activistes de Thalufah. Car comme les partis d’opposition, ceux-ci arguaient que le mandat du général Prayut aurait dû être compté à partir du moment où il a été royalement approuvé comme Premier ministre en vertu de la précédente charte intérimaire post coup d’État, à l’époque du Conseil national pour la paix et l’ordre (NCPO). Il est intéressant de constater que ces appels à manifester vont coïncider avec la fin du décret d’urgence installé pendant la période Covid-19. Ce qui risque de rendre la rue « bouillante ». Le groupe Ratsadon a d’ailleurs appelé ses supporters à se vêtir de noir entre le 1er et le 7 octobre « pour gémir sur la mort de l’avenir de la Thaïlande » tout en qualifiant Prayut de « Premier ministre illicite ».

 

Le principal parti d’opposition Pheu Thai a affirmé que « le raisonnement (du jugement) pourrait aller à l’encontre de l’esprit de la charte et créer de futurs problèmes d’interprétation ». Façon de dire que cette décision entame la légitimité de Prayut au poste suprême. Selon le Pheu Thai, « la véritable inquiétude est de savoir si les problèmes enracinés dans la société thaïlandaise au cours des huit dernières années depuis le coup d’État militaire pourraient être résolus afin que le pays puisse revenir à un système véritablement démocratique avec un véritable État de droit ». Quant au Move Forward Party, il appelle le public à atteindre les 50 000 pétitionnaires pour espérer organiser un référendum afin de démanteler la constitution « militaire » présente et en faire une nouvelle. Sa réponse est donc juridique car ses jeunes leaders savent que la constitution actuelle avec un Sénat coopté par l’armée et l’establishment est un frein à une véritable alternative politique.

 

Même si ces deux principaux partis d’opposition font très bonne figure dans les récents sondages mesurant les futures Législatives. Mais en Thaïlande, les manœuvres derrière le rideau sont toujours imprévisibles, les 12 coups d’État réussis depuis 1932 montrent que ce ne sont pas toujours les suffrages qui permettent de gouverner. L’appréciation du Palais et la faible volonté des militaires, État dans l’État, de donner les clés de la gouvernance aux seuls civils seront des paramètres à prendre en compte dans les mois à venir.

 

Philippe Bergues

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