Il y a quelques années un accident respiratoire grave avait envoyé Michel Hermann à l’hôpital. À cette occasion il nous avait fait partager dans une chronique son imaginaire poétique. Que faire, quand l’angoisse et la douleur vous accompagnent jours et nuits dans le Centre de soins intensifs du Bangkok Hospital de Phitsanulok ? Rêver tout simplement et laisser votre imagination vagabonder sans retenue. Les infirmières rose-bonbon qui s’affairent autour de vous sont un bon sujet d’inspiration. Il rend ainsi hommage à sa manière au personnel médical si dévoué ici et ailleurs pendant cette crise du Covid-19. Bonne lecture donc.
Dans ce lieu si peu ludique
Où l’espoir et la souffrance
Se combattent en silence,
Le destin, lutin magique,
M’a envoyé une nuée
D’infirmières rose-bonbons,
Belles à croquer, pour vieux cochon.
Hélas, sur ce lit, épuisé,
Le souffle court, l’oxygène
Au bout d’un tuyau, seuls mes yeux
Suivent le spectacle joyeux
De ces beautés à la peine.
En Centre de Soins Intensifs,
Bardé de tubes et de drains,
Ces anges zélés veillent au grain,
Toujours prêtes, l’œil attentif.
Avec douceur et sourire,
Elles virevoltent sans bruit
Autour de mon corps amaigri
Et sans force. Mais leurs rires
Spontanés, naïfs, naturels,
Réveillent mes sens endormis.
Mes angoisses s’enfuient ainsi
Vers d’autres horizons plus charnels
Ici, la sensualité
Est partout, même à l’hôpital.
Vrai remède contre le mal,
Elle apaise votre anxiété,
Vous expédie dans un monde
De concupiscence et d’orgies.
Le corps est bien là, mais l’esprit
Est ailleurs. Il vagabonde…
On oublie tout, on regarde
Le va-et-vient des soignantes
Dévouées dont les corps hantent
Ces lieux. Bataillons de garde,
Combattantes des maladies,
Elles effleurent, elles caressent,
Touchent avec délicatesse
Les plaies du malade meurtri.
Ma préférée, c’est Fuang Fa,
Traduction de bougainvillier
En thaïe. Drôle de sobriquet
Pour une fine fleur là-bas.
Car celle-là n’a pas d’épines,
Mais un visage d’archange.
Et pour lui donner le change,
D’une main je la taquine
Furtivement par derrière
Elle roucoule et se dandine
En agitant sa poitrine,
D’enfant. Elle se laisse faire,
Lèvres espiègles et enjouées,
Avant de quitter mon abri.
Elle est de garde cette nuit,
Et veillera sur ma santé.
Si son anglais n’est pas parfait,
Qu’importe, sa langue rose
Sait ouvrir les portes closes
Pour éteindre les feux follets.
Ces charmantes créatures,
A la plastique parfaite,
Ces Infirmières-starlettes
Sans trop forcer leur nature
Savent raviver le espoirs
Des cœurs et des corps flétris.
Je m’en vais, je suis guéri.
C’est sûr, je reviendrai vous voir,
Belles de nuit. Mes humeurs
Chroniques sont là, pour l’occasion,
Qui s’inviteront sans façon
Pour humer vos douces odeurs.
Michel Hermann