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GAVROCHE – ROMAN – Dans nos archives «La fille qui aimait les nuages», épisode 11

Journaliste : Patrice Montagu-Williams
La source : Gavroche
Date de publication : 14/06/2020
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Un drame familial en passe d’accoucher d’une crise politique et diplomatique majeure entre la France et le Vietnam. L’épisode 11 de «la fille qui aimait les nuages», que nous publions ce dimanche, nous plonge dans les coulisses de la raison d’Etat. Comment le très puissant parti communiste vietnamien va-t-il faire face à la menace de défection d’Anh Hùng, chef de sa délégation venue à Paris négocier un important contrat d’armement ?

 

Résumé de l’histoire et de l’épisode 10 : Anh Hùng, le chef de la délégation du Parti communiste vietnamien venu en France négocier un important contrat d’armement, a annoncé à Mai, sa femme, qui l’accompagnait ainsi que sa fille à Paris, qu’il ne voulait plus rentrer au Vietnam et qu’il allait demander l’asile politique. Mai n’était pas au courant et cette décision la déstabilise profondément. Elle aime sa vie à Hanoï et finit par avouer à Huyên, l’homme des services secrets vietnamiens venu avec la délégation, quels sont les projets de son mari. Ce dernier lui annonce qu’il s’y opposera par tous les moyens…

 

Épisode 11 – Un roman de Patrice Montagu – Williams

 

La situation était en train de leur échapper alors Huyên a appelé son contact à l’ambassade. Anh Minh lui a ordonné de venir immédiatement le rejoindre.

 

Le taxi longe la Seine. Le soleil éclabousse de ses rayons le viaduc du Pont de Bir-Hakeim sur lequel serpente paresseusement une rame de métro verte et blanche. Vieux réflexe professionnel, Huyên aime toujours savoir exactement où il se trouve. Il regarde par la fenêtre de la voiture et aperçoit une plaque apposée à un coin de rue sur une façade d’immeuble sur laquelle est écrite « Avenue du Président Kennedy ».

 

Le souvenir de la dioxine

 

Il n’était pas encore né au temps de Kennedy, mais il sait que c’est ce salaud, deux ans avant son assassinat, qui avait donné son feu vert au lancement de l’opération Ranch Hand, une effroyable guerre chimique déclenchée par les Yankees contre son pays dont il était une victime indirecte : on avait constaté très tôt chez lui un taux élevé de dioxine dû au fameux agent orange fabriqué par Monsanto alors qu’il était pourtant né quatre ans après que son usage ait été interdit ! Les conséquences avaient été terribles : il ne voyait pratiquement que d’un œil et sa main gauche était à moitié paralysée. Il remercierait toute sa vie le Parti de l’avoir engagé dans ses services secrets malgré son infirmité et de lui avoir même permis d’atteindre le rang de capitaine.

 

Une odeur d’encens

 

Une odeur d’encens flotte dans le hall de l’ambassade. Huyên n’avait pas remarqué, la dernière fois qu’il était venu, l’existence d’un autel dressé au pied d’un tableau représentant Oncle Ho sur lequel des fleurs sont déposées de chaque côté d’un encensoir. Le régime cultivait habilement une forme de syncrétisme entre bouddhisme et communisme : l’encens brûlé et les fleurs constituaient, pour les bouddhistes, la principale religion du pays, une offrande faite à une personne révérée en signe de respect.

 

— Nous avons commis une faute, déclare Anh Minh avant même qu’Huyên ne se soit assis. Nous n’aurions pas dû faire confiance à la police française et laisser la fille du Crapaud se promener seule dans Paris.

 

L’homme de la Sécurité Militaire est tendu. L’affaire est grave.

 

Asile politique

 

— Pas besoin de te préciser, bien entendu, qu’il est hors de question qu’un membre du Bureau Politique vietnamien demande l’asile politique.
Huyên hoche la tête. Il se contente d’attendre les ordres.

 

— Maintenant que le contrat est signé, on n’a plus besoin du Crapaud. De toute façon, il a perdu la confiance du Secrétaire Général. Comme il ne se laissera pas embarquer de force, il doit être éliminé, avec discrétion, sans créer de problèmes avec les Français et risquer de retarder la mise en œuvre du contrat. Et il faut faire vite : je te rappelle que la délégation doit quitter Paris dans deux jours…Tu as une idée, capitaine ?

 

Huyên a déjà réfléchi à ce qu’il fallait faire. Le problème serait réglé sans que le Parti puisse être soupçonné.

 

— Sa femme va nous aider. Sans le savoir, bien entendu…

 

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