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THAÏLANDE – SOCIÉTÉ: Petit guide décalé du bouddhisme thaïlandais

Journaliste : Redaction
La source : Gavroche
Date de publication : 29/08/2020
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Chaque société possède ses propres codes. Une histoire de culture, et bien souvent de religion. En Thaïlande, le bouddhisme, pratiqué par 95% de la population, régit bien des aspects du quotidien des Thaïlandais. Voici les réponses aux questions que vous vous êtes sûrement posées sur certaines coutumes surprenantes aux yeux des Occidentaux.

 

La contemplation

 

Mais comment peuvent-ils rester des heures à ne rien faire ?

 

Eh oui, c’est un sport quasi national en Thaïlande, surtout pratiqué par les anciens. A croire que ces derniers jouent à celui qui restera inactif le plus longtemps, assis sur un banc à regarder les nuages défiler. Mais cette habitude n’aurait rien d’innée. Elle tiendrait plutôt de l’acquis. Car c’est un véritable savoir-faire que la méditation. Cette activité spirituelle n’est pas réservée aux seuls bonzes. La plupart des Thaïlandais sont capables de la pratiquer, même au bureau ou dans leur voiture, au point de pouvoir passer des heures dans les embouteillages sans péter les plombs… Mais nul besoin d’être Thaïlandais pour s’initier aux joies de la contemplation ou de devenir novice le temps de quelques semaines ou de quelques mois. On y apprend l’humilité et la frugalité. La vie s’organise autour de l’apprentissage de l’enseignement du Bouddha, de la méditation et des corvées d’entretien du temple. C’est même une obligation familiale pour chaque Thaïlandais du sexe fort. Un véritable service religieux d’utilité publique qui permet également aux Thaïlandais de gagner des points.

 

Les mérites

 

« Gagner des points ? » Mais à quoi jouent-ils ?

 

À un grand jeu dont le lot à gagner n’est pas une poignée de Smarties, mais le salut de leur âme. Au moins une fois par jour, tout Thaïlandais qui se respecte s’évertue à faire « tham boun », que l’on peut traduire par « acquérir du mérite ». Ou bien par « faire le bien », selon votre interlocuteur ou le dictionnaire que vous ouvrirez. Il s’agit de faire un maximum de bonnes actions, plus que de mauvaises en tout cas, pour obtenir un bon karma, le karma étant « l’indicateur global des actions conscientes entraînant une conséquence positive ou négative sur le monde ». Avoir un bon karma assurerait donc bonheur, sécurité et prospérité dans vos vies futures… en attendant l’Illumination ! Bref, autant éviter de réapparaître en gecko ou en cafard, deux bestioles qui n’ont pas vraiment la cote ici-bas… Les points gagnés peuvent également être transférés à des proches ou à des personnes que nous aimons, sans même payer de droits de succession ! Voilà pourquoi, bien souvent, les novices de passage dans un temple avouent ainsi faire plaisir à leurs parents.

 

Les fêtes de “wat”

 

Pourquoi les fêtes de village se font-elles toujours dans les temples ?

 

Parce que ce ne sont pas des fêtes de village, même si cela y ressemble beaucoup, mais des fêtes de temple (wat), organisées au bénéfice du wat (temple). Comme dans une fête de village, vous trouverez un petit marché, des stands de nourriture, des concerts, une sono à faire fuir les « pii » (fantômes locaux) et une mini fête foraine. Tous les bénéfices sont reversés au temple. Les bonzes organisent également des concours de luk thung (chants traditionnels) : sur une scène défilent des concurrents de tous âges. Le public vote en achetant une couronne de fleurs et en l’offrant à son candidat préféré. Dans les campagnes, ce type d’évènement est le principal moyen de récolter de l’argent et d’entretenir les temples. Tout comme passer quelques semaines au service du Bouddha, ces fêtes sont aussi l’occasion d’engranger des bons points.

 

Les esprits

 

C’est quoi cette petite maison de poupées à l’entrée de chaque propriété ?

 

Ne vous fiez pas à leur apparence ! Leurs locataires sont… invisibles ! Enfin, la plupart du temps. C’est ici que la survivance des croyances animistes dans la société thaïlandaise est la plus palpable. Il est fortement recommandé, au risque de vivre en concubinage avec d’horribles fantômes, de placer sur chaque propriété un autel dédié aux esprits des anciens occupants des lieux, fussent-ils sympas ou cruels. Veillez également à ce qu’ils aient de quoi se sustenter. Objectif : qu’ils y restent et qu’ils ne viennent pas vous chatouiller…

 

Les Thaïlandais croient aux pii (fantômes) dur comme fer. Certains sont terrifiants, comme pii Porp qui utilise ses pouvoirs maléfiques pour posséder des personnes qu’il dévore ensuite de l’intérieur en digérant lentement leurs viscères. Si vous souhaitez un aperçu de ceux qui pourraient bien cohabiter avec vous sans que vous ne le sachiez, branchez votre poste de télévision sur les chaînes locales, ils s’y produisent chaque soir ! Rien de tel pour terrifier un enfant, et bien plus efficace qu’un martinet ou une fessée… Ces croyances cohabitent sans souci avec la pratique du bouddhisme et de l’hindouisme. Il est donc courant de voir, à côté d’une maison aux esprits, une statue de Bouddha ou de Shiva.

 

Croyance

 

Pourquoi tolère-t-on le meurtre d’un moustique mais pas d’un cafard ?

 

Ah ! Vous aimeriez bien savoir pourquoi personne ne fait rien pour vous débarrasser de ce sale cafard qui hante votre chambre chaque nuit ? C’est la première règle de base de l’enseignement du Bouddha : ne pas tuer. Chaque être vivant, chaque âme fait partie d’un grand tout universel. Tuer un animal, un insecte ou un être humain, c’est amputer ce grand tout de l’un de ses membres. Bien, me direz-vous. On ne peut pas tuer ce cafard, mais les Thaïlandais n’hésitent pas écraser les moustiques qui viennent les piquer, ou massacrer à coup de bâton un serpent. Pire encore, à manger à chaque repas du cochon, du porc ou du bœuf ! Eh oui, même les bonzes mangent de la viande. Ils n’ont pas le choix, paraît-il, car ils prennent ce que les fidèles leur tendent. Les plus croyants se contentent de chasser les moustiques qui les importunent. Mais la plupart ne s’embêtent pas avec ça. Car c’est le principe du bouddhisme : chacun fait le bien quand il peut. Le plus important, c’est d’essayer. Et si d’un côté je mange de la viande ou je tue un animal, j’irai gagner des points au temple le lendemain…

 

L’aumône

 

Pourquoi faut-il se lever à l’aube pour être sûr de croiser un bonze ?

 

Seuls les lève-tôt auront l’occasion d’assister à la quête matinale des bonzes. Chaque matin, ils marchent pieds nus le long des trottoirs ou se positionnent en face d’un marché, les mains ballantes, dans l’attente des offrandes que tout pieux bouddhiste s’empresse de faire quand il en a l’occasion (encore des bons points !). Ils reçoivent un peu de tout : du riz, de la viande, des fruits, des paquets de chips, des gâteaux…

 

Les bonzes se lèvent très tôt, aux environs de 4 heures du matin, pour la première prière. Vers 6 heures, quand leurs compatriotes commencent leur journée, ils partent demander l’aumône. Le frigo est vide puisqu’ils n’ont pas le droit de conserver de nourriture. Le dernier repas qui leur est autorisé étant à midi, mieux vaut que le temple ne soit pas trop éloigné du village… Ils passeront le reste de la journée à méditer, prier, bénir et prendre soin des lieux.

 

Objets sacrés et gris-gris

 

Pourquoi cet arbre est-il entouré de lambeaux de tissus et de guirlandes de fleurs ? C’est pour Noël ?

 

Eh non, même si les Thaïlandais aiment s’approprier les fêtes de toutes les religions, et surtout Noël ! Dans cette société où se mêlent naturellement animisme et bouddhisme, tous les arbres ont un esprit. Il faut donc les traiter comme n’importe quel être vivant. Certains d’entre eux obtiennent même le statut d’arbre sacré. On les pare alors de bouts de tissus, de fleurs, on brûle des baguettes d’encens et on leur offre à boire et à manger. Ces offrandes sont un moyen d’obtenir la protection du ou des esprits qui y résident. Dans la religion bouddhiste, les arbres ont également un statut à part. Certains sont directement liés à la vie du Bouddha : « le banyan sous lequel le Bouddha s’est éveillé, le bois d’Ashokas dans lequel sa mère accoucha, le jambosier sous lequel il médita, le manguier sous lequel il effectua le « miracle duel » et le sal sous lequel il s’éteignit. »

 

Pourquoi les marchés aux amulettes attirent-ils autant de monde ?

 

C’est un vrai commerce en Thaïlande. Le prix d’une amulette peut monter jusqu’à plusieurs millions de bahts. Attention, ce ne sont pas de simples gris-gris. Elles ont de vrais pouvoirs magiques, conférant force et invincibilité… Elles apportent la chance, la fertilité ou encore attirent le sexe opposé. Chaque Thaïlandais en possèderait au moins une, voire plusieurs dizaines. Elles représentent le plus souvent le Bouddha ou un moine célèbre et sont réalisées (normalement) dans la plus grande tradition bouddhiste. Leur pouvoir dépend essentiellement de la bénédiction d’un maître et de son pouvoir spirituel. Plus il est connu et réputé, plus l’amulette sera chère. Encore une chose avec laquelle on ne rigole pas en Thaïlande : si vous montrez scepticisme et moquerie sur les pouvoirs magiques de tel ou tel objet, jamais on ne vous initiera aux immenses possibilités que vous offrent ces pendentifs. Vous voilà prévenu !

 

Les bracelets brésiliens sont-ils à la mode ici ?

 

C’est plus qu’une mode, c’est un acte religieux ! Ces petits bracelets en coton sont tissés par les bonzes. Tout comme pour le bracelet brésilien populaire en France dans les années 80, il faut réaliser un vœu avant de le porter et attendre que le bracelet se casse de lui-même. Le bonze l’accroche aux poignets des personnes qu’il veut remercier pour une bonne action. Comme de participer à une fête de temple. Ou bien aider au ménage. Même les touristes y ont droit et sont fiers de les porter. L’image de tolérance envers les non-bouddhistes n’en sortira que mieux renforcée. Pour les Thaïlandais, c’est un signe extérieur de bonne conduite. Plus ils en ont, plus ils fréquentent le temple !

 

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