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INDOCHINE – HISTOIRE: A Lang Son, la préhistoire vietnamienne d’Henri Mansuy

Journaliste : Didier Mansuy
La source : Gavroche
Date de publication : 11/12/2020
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Nous poursuivons nos publications sur Henri Mansuy, fascinant découvreur des traces de la préhistoire indochinoise au Cambodge, au Vietnam et au Laos. En route cette fois pour les gisements préhistoriques des environs de Lang-son et Tuyên-quang, au Tonkin. La grotte creusée dans le roc, au S. O. du village de Mai-pha se trouve à 1600 mètres de la ligne de chemin de fer de Hanoï à Lang-son.

 

Une étude historique de Didier Mansuy.

 

Une quantité considérable de tessons de poteries portant des traces d’impression de vannerie, dans laquelle ils ont été modelés et dont ils ont gardé la forme, a été mise au jour. Une réelle perfection d’exécution est à remarquer, avec une minceur des parois, la régularité et de belles proportions des vases, comme des formes et des galbes assez variés. Il y a des vases dont certains ont des contours globuleux, des jattes, des bols sans pieds ni anses. Des tessons portent des anses funiculaires mamelonnées, pincées horizontalement et percées d’un trou vertical de petit diamètre destiné apparemment à recevoir un lien de suspension.

 

Petits vases à parois latérales

 

La particularité la plus curieuse de ces poteries de type Mai-pha[1] est la fréquence relative de petits vases à parois latérales couvertes d’une décoration exécutée au trait, d’une manière assez primitive : cette ornementation par sa simplicité constitue un contraste avec l’habilité incontestable apportée à la fabrication de ces vases. Ces vases ne sont connus que par des fragments souvent assez grands mais il est possible de reconnaitre que ces cornets se dilatent assez vite afin d’arriver à un diamètre d’ouverture égalant ou dépassant deux fois la base. La décoration en creux, phylliforme et elliptique est souvent disposée par groupe rayonnant de quatre. Ce type de poterie semble tout à fait caractéristique et spécifique à Mai-pha, il ne fut pas rencontré avant cette découverte. Un ensemble de faits incite à penser que ces petits vases perforés surbaissés, à large ouverture, ont été employés à la combustion de matières végétales odorantes. Ils pourraient être des brûle-parfums primitifs utilisés dans la pratique d’un rituel. Certains trous de perforations auraient ainsi servi à activer la combustion.

 

A la pâte constitutive de ces vases ont été ajoutées des matières charbonneuses et des grains de quartz (cette technique est quasi universelle pour éviter le retrait lors de la cuisson).

 

A Mai-pha[2], l’outillage lithique n’est représenté que par une petite hache polie à biseau en phtanite, au tranchant oblique qui suggère également une utilisation comme burin. Dans les grottes environnantes ont été découvertes, en extrême abondance, des coquilles de grandes mélanies, fragiles, présentant toutes une fracture de l’extrémité de la spire, montrant que ces mollusques entraient dans l’alimentation. Des fragments d’un crâne humain à parois peu épaisses avec portion du maxillaire supérieur ayant conservé des molaires à surface occlusale très usée ont également été découverts. Ce sont les seuls restes humains rencontrés dans ces grottes de Lang-son avec un fragment calciné de diaphyse de fémur d’un individu semblant de petite taille et faiblement développé musculairement.

 

Monsieur Gage, propriétaire de la concession

 

Les très intéressants objets de la grotte de Binh-ca près de Tuyên-quang ont été donnés par monsieur Gage[3] propriétaire de la concession. Binh-ca est au Sud-Est de Tuyên-quang, sur la rive gauche de la Rivière Claire. Y a été découvert un objet de forme sub-cylindrique dilaté aux extrémités, pourvu d’une sorte de poignée latérale horizontale située sur le milieu de sa hauteur. Cet objet est peut-être une lampe mais cette idée n’explique pas complètement la tubulure pratiquée dans l’axe de l’objet. Les rares tessons sont plus épais qu’à Lang-son. Trois haches polies à biseau simple, courbe, se confondant insensiblement avec une des faces ont également été recueillies. De ce gisement proviennent également des pointes de lances ou de sagaies en schistes : de longueurs variables, minces et acérées. Elles semblent se terminer par un talon rétréci en une soie ou un tenon propre à l’emmanchement. Un anneau en ivoire (d’éléphant semble-t-il) de proportion géométrique parfaite est présenté comme étant sans doute un bracelet. Des dents de buffles imposantes ont également été découvertes.

 

Conclusion.

 

Le petit nombre d’objets recueillis dans les gisements de Mai-pha et Binh-ca ne permet que des comparaisons limitées. La facture, le mode d’utilisation, le but, toutes les caractéristiques ethnographiques du mobilier et de l’outillage de chacun de ces gisements les différencient assez nettement. A Mai-pha la poterie usuelle, abondante, est plus fine, plus légère et peut-être plus variée qu’à Binh-ca dont la céramique, mal représentée, paraît plus grossière et plus rude, même dans l’exécution de l’appareil énigmatique (la lampe). A Binh-ca, il n’y a rien de comparable aux petits vases perforés de Mai-pha. Si à Mai-pha et Binh-ca des haches à biseau de type extrême-oriental le plus répandu ont été rencontrées, par contre aucune arme véritable comparable aux pointes en schiste de Binh-ca n’a été découverte à Mai-pha, site pourtant exploré avec plus de méthode.

 

Les notes de l’article

 

[1] Sur ce site de Mai-Pha, le docteur Nguyen Cuong, directeur du musée de Hanoï, reprit des fouilles et fit sa thèse publiée au Vietnam en 2002.

 

[2] Le 21 avril 2016, le directeur du musée national d’histoire de Hanoï, monsieur PhD. Nguyen Van Cuong, rencontré dans son bureau du musée d’histoire à Hanoï, me donna son livre « The Mai Pha culture » consacré à son étude sur le site de Mai Pha, réalisé en 2002 et qui apporte des descriptions et des illustrations des objets qu’il y découvrit. –>

 

[3] Sans doute monsieur Gache (probablement Henri). Il semble avoir commencé vers 1901comme commerçant à Hagiang (3e territoire militaire). Puis représentant en 1906 de la Cie générale du Tonkin et de l’Annam à Tuyên-Quang (même territoire militaire). En 1911, il commence une plantation de café sur sa concession de Tuyên-quang (85 ha). A partir de 1915, il est entrepreneur et planteur. Entrepreneur de vidange 44, bd Gambetta à Hanoï en 1920. Sa trace est perdue après 1925.

 

 

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