Home Accueil THAÏLANDE – SOCIÉTÉ : La philosophie de vie « à la thaïlandaise » est une réalité. En voici quelques exemples

THAÏLANDE – SOCIÉTÉ : La philosophie de vie « à la thaïlandaise » est une réalité. En voici quelques exemples

Journaliste : Dusit Manapan Date de publication : 22/02/2022
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Thaïlande Bangkok

 

Nous publions ici une série de quatre articles mis à la disposition de Gavroche par le Ministère Thaïlandais des affaires étrangères pour faire comprendre le mode de vie Thaïlandais. Il s’agit du premier épisode, sous la plume de Dusit Manapan.

 

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La Thaïlande est un fervent défenseur du développement durable au niveau mondial. Le royaume a fait la promotion de sa propre Philosophie d’Economie de Suffisance (SEP) en tant qu’approche alternative pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies. Introduite pour la première fois par le roi Bhumibol Adulyadej après la crise financière asiatique de 1997, la SEP est devenue le concept de développement de la Thaïlande, universellement applicable.

 

Cette philosophie est l’aboutissement des réflexions de Sa Majesté, issues de décennies de visites et de conversations avec des villageois dans tout le pays. Même le domaine de la villa Chitralada, son palais royal, était utilisé pour expérimenter des projets agricoles susceptibles d’être étendus à d’autres régions. Cet héritage royal reste aujourd’hui encore au cœur des efforts de développement national de la Thaïlande. 

 

La SEP nous fournit une base, et agit comme une boussole vers la durabilité, basée sur trois principes interdépendants et deux piliers. Le premier principe est la modération, ce qui signifie produire et consommer dans les limites de ses capacités et éviter les excès. Le second est le caractère raisonnable, ou l’utilisation de nos facultés mentales pour évaluer les causes et les conséquences des actions sur notre bien-être, notre foyer et notre communauté. La prudence est le troisième principe, qui fait référence à la gestion des risques afin d’être préparé aux impacts de toute perturbation. En outre, les deux piliers essentiels nécessaires à la mise en œuvre réussie des principes de la SEP sont la connaissance, ainsi que l’éthique et les vertus. Le premier nous permet de planifier et d’exécuter efficacement les activités de développement. Le second favorise le développement humain en mettant l’accent sur l’honnêteté, l’altruisme et la persévérance, dans le but ultime de créer des citoyens actifs et engagés, et de promouvoir la bonne gouvernance.

 

Évidemment, la SEP n’est pas un manuel pratique de développement. Il s’agit plutôt d’une philosophie qui guide notre réflexion intérieure pour nous immuniser contre les chocs extérieurs. De même, le concept est flexible et peut être appliqué dans n’importe quel environnement et à n’importe quel niveau. Cependant, l’économie de suffisance ne signifie pas que nous devons être complaisants dans la vie. Nous pouvons envisager d’aller au-delà de nos besoins de base tant que cela n’excède pas nos moyens et capacités existants. L’essence de la SEP est claire : elle nous encourage à être raisonnable et réaliste.

 

La SEP a inspiré de nombreux projets en Thaïlande et ailleurs. L’Agence thaïlandaise de coopération internationale (TICA) est le coordinateur de la Thaïlande pour la mise en place d’une coopération en matière de développement avec des partenaires internationaux dans le monde entier. Les modèles de développement basés sur la SEP mis en œuvre par la TICA sont spécifiquement conçus pour aider les pays en développement à échapper au cycle de dépendance excessive à l’aide étrangère. L’objectif est de créer des communautés résilientes en partant du niveau individuel, en améliorant la productivité dans les limites des ressources et des revenus existants.

 

Depuis 2003, la TICA a réalisé 36 projets SEP dans 21 pays d’Asie-Pacifique et d’Afrique, de la République kirghize au Timor-Leste et du Mozambique aux îles Salomon. À l’heure actuelle, il y a 29 projets dans 19 pays, ce qui prouve que la SEP peut être traduite en action partout. 

 

Il existe deux principaux types de projets SEP à l’étranger pour institutionnaliser le processus d’auto-développement et conserver les connaissances et la sagesse locales : 1) la création de centres d’apprentissage SEP, qui servent de base de données complètes et de centre d’apprentissage communautaire avec un expert désigné pour fournir des conseils ; et 2) le développement de communautés durables SEP pour servir de modèles de développement.

 

Des projets de centres d’apprentissage SEP sont en cours de réalisation au Laos, au Myanmar, au Timor-Leste, au Brunei Darussalam, aux Tonga, aux îles Fidji et au Lesotho. Parallèlement, des projets de communautés durables SEP sont en cours au Cambodge, au Vietnam, aux Philippines, au Bhoutan, au Sri Lanka, au Bangladesh, au Bénin, aux îles Salomon, au Vanuatu, en République kirghize, au Népal et au Sénégal. Des experts thaïlandais et des volontaires de la TICA (Friends of Thailand) ont été envoyés pour travailler avec les parties prenantes locales dans plusieurs de ces pays.

 

Par exemple, au Laos, des fonctionnaires thaïlandais et laotiens ont créé des centres d’apprentissage pour le développement durable de l’agriculture à l’école technique agricole de Dongkhamxang et au collège technique et professionnel de Khammouane. Ces centres maximisent le potentiel des ressources humaines en proposant des cours de renforcement des compétences qui couvrent l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement, comme la gestion des exploitations agricoles, la gestion de la productivité et l’analyse des marchés. Dans un Laos enclavé, l’agriculture est un secteur vital : le renforcement de ses capacités agricoles permettra de préserver la sécurité alimentaire nationale et de permettre aux agriculteurs de maintenir leurs moyens de subsistance.

 

Au Bhoutan, les professionnels de la SEP ont aidé à développer des produits communautaires en transposant le programme thaïlandais One Tambon (Sub-district) One Product (OTOP) en One Gewog One Product (OGOP) dans les districts de Haa et Tsirang. Le modèle OGOP comprend la création d’un centre d’apprentissage communautaire sur le tourisme de proximité dans le district de Haa, et d’un autre sur le développement communautaire durable dans le district de Tsirang, en vue de responsabiliser les autorités et les communautés locales.

 

Aux Tonga, la fondation Chai Pattana, sous patronage royal, et le palais royal des Tonga ont supervisé conjointement un projet de modèle agricole, qui applique la “nouvelle théorie de l’agriculture”. L’idée est de diviser les terres à des fins multiples telles que la culture, l’élevage, la pêche et les ressources en eau. Cette approche a permis de garantir des ressources suffisantes pour la consommation des ménages et de réduire la dépendance à l’égard des importations alimentaires. Elle a permis d’augmenter la productivité agricole, de générer des revenus et d’élever le niveau de vie. Le succès de ce modèle de démonstration a depuis été reproduit dans toutes les îles du royaume.

 

Le développement est réalisable par différentes voies. Dans de nombreux cas, comme au Laos, au Bhoutan et aux Tonga, l’approche simple mais pratique de la SEP a été aussi bénéfique que toutes les autres alternatives, tout en étant encore plus adaptée aux conditions locales respectives.

 

Le concept n’est, bien sûr, pas exempt de scepticisme. Mais la Thaïlande a suffisamment essayé et testé l’applicabilité du SEP avant de le partager à l’étranger. Sur la base de sa politique  de prospérité du voisin, la SEP est l’un des outils de la Thaïlande pour aider les pays voisins à atteindre la sécurité économique, la sécurité alimentaire et l’autosuffisance. Le succès des projets SEP dans les pays voisins ne profitera pas seulement aux communautés locales, mais contribuera également à la paix, à la prospérité et à des liens plus étroits entre les peuples le long des zones frontalières avec la Thaïlande. Le même principe s’applique à la coopération avec les pays au-delà de la région, qui consiste à les aider à passer du statut de pays bénéficiaire à celui de partenaire de la Thaïlande dans un éventail plus large de dimensions.

 

Le développement durable est un programme mondial qui nécessite une action collective, et la SEP est la contribution de la Thaïlande à cette fin. Grâce à des décennies d’expérience accumulée, la Thaïlande a découvert sa réponse sur la façon de transmettre un monde durable à nos jeunes générations par le biais de l’autonomisation locale. Des milliers de projets de développement basés sur la SEP en Thaïlande ont déjà amélioré les moyens de subsistance des communautés dans tout le pays. En tant que tel, la SEP pourrait peut-être être une autre piste de développement pratique et louable que d’autres pays pourraient adapter à leurs contextes respectifs.

 

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M. Dusit Manapan est un diplomate de carrière, occupant actuellement le poste de secrétaire permanent adjoint du ministère des Affaires étrangères. Dans le cadre de ses fonctions actuelles, il supervise également l’Agence de coopération internationale de la Thaïlande (TICA), l’agence d’aide internationale de la Thaïlande. M. Manapan possède une vaste expérience de la diplomatie bilatérale et multilatérale, et a précédemment occupé des postes clés, notamment celui d’ambassadeur de Thaïlande auprès de l’État du Koweït et de directeur général du département des affaires de l’Asie du Sud, du Moyen-Orient et de l’Afrique.

2 Commentaires

  1. Le développement durable implique un respect de la nature et de l’environnement, les rues et les routes de Thaïlande sont un champ permanent d’agression de la nature avec des déchets et des sacs plastiques jetés partout sans aucune considération de la pollution que cela constitue et des dégâts pour l’avenir

  2. Prôner le développement durable et la philosophie d’économie de suffisance chère au feu roi Bhumibol est une vertu. Si cette application est, sans aucun doute, une réalité dans beaucoup de provinces de la Thaïlande rurale, il faut constater qu’elle l’est moins dans les grandes villes et, en premier lieu, Bangkok. Par exemple, un marché de nuit populaire avec de la street-food issue de produits locaux a disparu en 2011 : le Suan Lum Night Bazar près du parc Lumphini. Installé sur des terres du CPB (Bureau des propriétés de la Couronne), ce marché a laissé place à une grande opération immbilière de prestige, le One Bangkok. La capitale est entrée dans la frénésie du consumérisme avec la multiplications des temples commerciaux que sont les malls au noms bien connus. Au détriment d’une Green Bangkok, d’une véritable politique urbaine prenant en compte le développement durable et les mobilités douces. Mâis on peut noter que des efforts sont réalisés avec la récente ouverture du parc de Suan Pa Benjakitti et l’objectif d’augmenter le nombre d’espaces verts à Bangkok.

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